Le récent article consacré au professeur André Mermoud, à peine de retour du Sénégal, a ému quelques dizaines de milliers de lectrices et de lecteurs
Comme la rubrique Découverte musicale est également en vogue auprès de notre lectorat, nombre de lecteurs nous ont demandé ce qu’il était de la musique sénégalaise. Notre éditeur s’est attelé à la tâche. La rédaction
J’aurais dû retourner au Sénégal en 2020 où j’avais prévu d’effectuer un grand tour dans ce pays bien sympathique et accueillant. La fermeture des frontières due à la pandémie contraria mes projets. J’espère m’y immerger pendant quelques temps en 2024.
La tâche que m’a confiée mon équipe est bien difficile. D’abord parce que la musique africaine, dans son ensemble, contient une richesse inouïe et ensuite celle proprement acquise par le Sénégal l’est tout autant. Les rythmes musicaux du Sénégal sont en effet très variés et reflètent la diversité culturelle et ethnique du pays. Il existe des rythmes traditionnels, liés aux instruments, aux langues et aux rites de chaque groupe ethnique. Ensuite, on ne saurait ignorer les rythmes modernes, influencés par les musiques du monde, notamment cubaine, américaine, européenne, etc.
Les rythmes traditionnels
Là aussi, impossible de les mentionner tous. Je pense au mbalax, qui est un genre de musique percussive wolof, popularisé par Youssou N’Dour. La musique de cet artiste incomparable a fait le tour du monde. Je suis certain que vous vous souvenez. Regardez et écoutez :
Le mbalax est souvent accompagné de chants en wolof, en français ou en anglais, et d’instruments modernes comme la guitare, la basse, le synthétiseur, etc.
Vous savez que la salsa, d’origine cubaine, mélange des éléments de jazz, de rumba, de son, de mambo, etc. Eh bien ce rythme est très apprécié au Sénégal, où il a été introduit par des musiciens tel que Laba Sosseh, Pape Seck, Pape Fall. La salsa sénégalaise se distingue par l’utilisation de langues locales comme le wolof, le mandingue et la langue du peuple Peul.
Le hip-hop est une musique d’origine américaine qui se base sur des rythmes rapides et syncopés et sur des paroles souvent engagées et contestataires. Le hip-hop sénégalais, lui, est apparu à la fin des années 1980. Il a connu un essor dans les années 1990, avec des groupes comme Positive Black Soul, Daara J, Pee Froiss, etc. Le hip-hop sénégalais se caractérise par l’utilisation de langues locales comme le wolof, le français, l’anglais, etc.
Le jazz sénégalais est influencé par les musiques traditionnelles. Ces dernières sont jouées par d’innombrables instruments pratiqués au Sénégal, notamment la kora, le xalam, le balafon, etc.
L’emblématique kora
La kora est un instrument à cordes typique de l’Afrique de l’Ouest, qui ressemble à une harpe, faite d’une demi-calebasse, tendue d’une peau de vache et d’un long manche comprenant 21 cordes. Cet instrument produit des sons mélodieux. La kora se joue debout ou assis, l’instrument devant soi, le manche bien en face, à hauteur des yeux. On empoigne les bulkalamo des deux mains et on joue avec les doigts (pouces et index) des deux côtés du chevalet, comme pour une harpe.
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Toumani Diabaté est l’un des favoris, mais il y en a bien d’autres.
Une kyrielle d’interprètes fabuleux
Il y en a naturellement de grandes quantités et qui ont leur public. Il est un peu difficile à l’Occidental que je suis d’émettre une appréciation musicale sur les diverses interprétations. Pourtant, si l’on veut suivre les tendances d’une brûlante actualité, force est de nommer Jahman X-Press. Il est auteur-compositeur et interprète. Regardez son clip riche en couleurs et écoutez sa chanson attachante.
Pas étonnant non plus qu’il plaise évidemment aussi à un très large public.
Parmi les chanteuses, je mentionnerai Mia Guissé. Elle a commencé à chanter à l’âge de 6 ans dans la chorale de son école et a participé à plusieurs concours de chant locaux. Elle connaît actuellement un succès fulgurant. De fait, elle se distingue par son style musical urbain africain, mêlant des influences de pop, de rap, de r&b, de dancehall et de musique traditionnelle. Elle chante en wolof, en français, en anglais et en langue du peuple Peul, sa langue maternelle. Ses chansons parlent d’amour, de joie de vivre, de confiance en soi, de solidarité et de fierté africaine
Un génie de la basse qui a fait vibrer le monde
Je ne saurai clore ce survol sur la musique sénégalaise sans mentionner Habib Faye. Il a participé à de nombreux festivals et concerts prestigieux, tel que le Festival de Jazz de Montreux, en Suisse, où il exécuta une performance des plus mémorables en 2016 selon les fans de jazz. Accompagné de son frère Jimmy Mbaye à la guitare, de son fils Ibou Faye à la batterie, et de son neveu Hervé Samb à la guitare, il nous montra comment il maîtrisait son instrument. Son sens de l’harmonie était exceptionnel et il était capable de jouer des lignes de basse complexes, rapides, mélodiques, groovy, tout en gardant le tempo et en soutenant le chant. Ce fut un soliste virtuose, extraordinairement expressif, voir prodigieusement inventif. Son talent musical faisait ressortir sa personnalité. Habib Faye fut non seulement bassiste, mais encore claviériste, guitariste, arrangeur, compositeur et producteur. Il fut surtout connu en tant que directeur musical de l’orchestre Super Étoile de Dakar de Youssou N’dour. Voilà sans nul doute pourquoi on disait de lui qu’il était le génie de la basse faisant vibrer le monde. Je pense que ce grand musicien et compositeur a marqué l’histoire de la musique africaine et internationale. Malheureusement, il nous a quitté pour d’autres mondes le 25 avril 2018, à Paris. Il était né le 22 novembre 1965, à Dakar.