Ouf ! De l’eau qui, enfin, tombe du ciel !

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©Shutterstock

Nos nombreux lecteurs ont adoré lire les deux premiers épisodes de la fabuleuse aventure végétale de Raphaël Colicci. Si vous avez raté le 2e épisode, le voici :

Pour ce troisième épisode, Raphaël Colicci nous apprend les difficultés auxquelles les « cultivateurs de la terre » sont exposés et rappelle à l’occasion la méthode dite des « Trois sœurs », pour remédier au gravissime problème de l’eau !

La rédaction

AB : Le 20 août, il s’est produit un petit miracle à Maio, l’île dont tu t’occupes dans l’archipel du Cap-Vert. Après des 11 ans d’attente, il a enfin plu. Pas beaucoup, mais une averse est enfin tombée du ciel.

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RC : Oui, là-bas, ce furent des larmes de joie qui ont coulé et mon commentaire laconique : « Quelle belle synergie entre l’eau venue du ciel et la terre que nous travaillons avec cette intention nourricière qui savoure cette bénédiction.»

AB : On pourrait même dire que l’eau est le sang qui fait vivre notre belle planète bleue. A force qu’on parle au public de climat et de ses problèmes pour l’humanité, on lui répète au fond toujours la même chose. Que l’eau est un élément vital pour nous autres, pour le règne animal et végétal. Que l’ensemble des impacts des activités humaines sur l’environnement peut affecter le cycle de l’eau et modifier la distribution et l’intensité des précipitations. Toi qui t’engages corps et âme pour la survie de l’île Maio, j’aimerais que tu nous en dises plus par des exemples.

RC : Oui, c’est certain, le changement climatique causé par les émissions de gaz à effet de serre, le réchauffement global de la planète entraînent une augmentation de l’évaporation de l’eau. Et à l’évidence une modification des courants atmosphériques.  A Maio, depuis 2011, il n’y a plus eu de pluie. Et malheureusement, ce ne sont pas les quelques gouttes qui sont tombées il y a quelques jours que cela changera beaucoup pour le moment. Cela provoque comme chez moi à Saint-Privat ou sur Maio pour ne prendre que ces deux exemples des changements dans la fréquence, la durée et la répartition spatiale des événements pluvieux. Nous connaissons des sécheresses plus fréquentes et plus intenses, tandis que dans d’autres régions subissent des précipitations plus abondantes, voire plus extrêmes. Le monde à l’envers, quoi !

AB : Le manque d’eau est un problème très sérieux pour l’agriculture, surtout dans le contexte du changement climatique. Je le comprends bien. Mais n’existe-t-il pas de solutions possibles pour faire face à cette situation gravissime, tout en optimisant l’utilisation de l’eau pour les cultures ?

RC : Oui, on peut augmenter la rétention naturelle de l’eau et des nutriments dans les sols et les bassins versants agricoles. Cela renforce la protection du climat, la biodiversité et la sécurité alimentaire . Il existe diverses mesures pour augmenter la rétention de l’eau et des nutriments, comme le paillage, les haies, les bandes enherbées, les cultures intermédiaires, etc. Toutefois, il faut tenir compte des conditions biogéoclimatiques locales et des besoins des cultures, comme sur l’île de Maio, par exemple. Tiens, as-tu entendu parler de la pratique des Trois sœurs ?

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AB : Hélas non, même si mon épouse adore faire du jardinage… Raconte.

RC : En Amérique centrale, l’association au sein des parcelles cultivées de maïs, haricots et courges est une pratique traditionnelle plurimillénaire. Ce trio de légumes est connu sous le nom des « trois sœurs » ou une milpa. C’est une méthode ancienne et durable de culture qui implique la rotation des cultures et l’utilisation de diverses plantes complémentaires pour créer un écosystème agricole équilibré. Dans une milpa, les agriculteurs cultivent une variété de cultures, telles que le maïs, les haricots, les courges, les piments et d’autres plantes, généralement sur une petite parcelle de terre. Chacune de ces plantes contribue d’une manière spécifique à l’écosystème de la milpa. Par exemple, le maïs peut servir de support pour les haricots grimpants, tandis que les courges couvrent le sol et aident à prévenir la croissance des mauvaises herbes. Les haricots, quant à eux, fixent l’azote dans le sol, ce qui améliore la fertilité.

AB : Comme nos lecteurs et lectrices adorent les vidéos que nous produisons – ce qui fait d’ailleurs notre succès, je leur propose de regarder la vidéo suivante :

RC : Oui, très instructive, cette vidéo. Dans la Milpa Maya, les trois sœurs sont cultivées avec une multitudes d’autres plantes, comestibles, médicinales, tinctoriales (plantes qui servent à teindre les tissus).

AB : Si j’ai bien compris, ce système des trois sœurs crée des relations bénéfiques, chacune des plantes aidant les autres à croître.

RC : Oui, mais pas seulement à croître. Ainsi, par exemple, l’ombre des feuilles des plants de courge permet de conserver l’humidité du sol. Donc, cette méthode est utilisée en permaculture, car elle protège le sol et sa biodiversité. La recherche contemporaine a mis en évidence une autre vertu de cette association : Les colonies bactériennes sur les racines des haricots capturent l’azote de l’air, dont une partie est libérée dans le sol permettant de satisfaire les besoins élevés en azote du maïs.

AB : Et pourquoi le maïs a-t-il tant besoin d’azote ?

Rc : Le maïs a besoin d’azote tout au long de son cycle, mais surtout entre le stade 6-8 feuilles et la floraison, où il absorbe environ 85 % de ses besoins totaux. C’est donc un élément essentiel pour la croissance et le développement du maïs. Il intervient dans la synthèse des protéines, des acides nucléiques, de la chlorophylle et des hormones végétales. Il permet au maïs de former des feuilles, des tiges, des racines et des grains de qualité. A Maio, le jour même où, après des années sans pluie, le ciel a bien voulu arroser l’île, les autochtones n’ont pas perdu une seconde.

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©Raphael Colicci – Ile de Maio et sa population que Raphaël Colicci aide par sa réalisation humanitaire 

Les autochtones appliquent, eux aussi la méthode des trois sœurs.

AB : Pratiquement tout le monde qui fait du jardinage sait qu’il faut arroser le matin ou le soir, quand il fait moins chaud, pour limiter l’évaporation. Il faut aussi privilégier un arrosage au pied des plantes, plutôt qu’un arrosage par aspersion, pour éviter le gaspillage. Le système du goutte-à-goutte est une méthode efficace pour apporter la quantité d’eau nécessaire aux plantes. Y a-t-il d’autres méthodes encore pour stocker l’eau ?

RC : Il convient de choisir des variétés de plantes résistantes à la sécheresse ou adaptées au climat local. Certaines plantes ont une meilleure tolérance au stress hydrique que d’autres, grâce à leur système racinaire profond, leur capacité à fermer leurs stomates ou leur cycle végétatif court. 

AB : Selon toi, il est donc important de sélectionner les espèces et les variétés les plus adaptées aux conditions climatiques de la région où l’on cultive ?

RC : Absolument ! Lorsque le jardin n’est pas immense, je conseille d’utiliser les oyas, des pots en terre cuite enterrés près des plantes et qui libèrent progressivement l’eau qu’ils contiennent aux racines des plantes voisines. De cette manière, ils permettent de maintenir une humidité constante dans le sol et de réduire la fréquence des arrosages. Le hic, c’est que le commerce propose des oyats à des prix onéreux, alors qu’il suffirait d’acquérir des pots en terre cuite très bon marché.

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Et des sous-coupes. Bouchez le trou du pot avec un peu de ciment, laissez sécher. Enterrez les pots, remplissez-les d’eau et couvrez-les avec les sous-coupes. Le tour est joué !


Notre ami Raphaël Colicci s’engage énormément personnellement dans son projet humanitaire « Maioasis » qui reçoit les fonds récoltés par l’Association Biodiversité et ressources. Chaque euro, chaque franc sera le bienvenu. Notre magazine se porte garant du sérieux de cette association à but non lucratif approuvée par la Commission française des comptes. Voici ses coordonnées bancaires :

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