Voilà à nouveau notre contributeur, peut-être le plus célèbre et aimé pionnier de l’agroécologie. Nos lecteurs ont appris à le connaître à travers quelques articles déjà, tel que Les incomparables saveurs des fruits oubliés1. Vu avez lu Maio a soif, mais miracle, commence à revivre
Et bien sûr vous avez hâte d’en savoir davantage. Car Raphaël a bien entendu, poursuivi sa mission avec cœur, en dépit des aléas que mère Nature lui a réservé. La rédaction
MaiOasis est une ambition que je partage avec de nombreux bénévoles et quelques donateurs. Comme les Dupond & Dupont cher à Tintin, je dirai même plus : L’ambition de Maio2 doit être bleue ! Je veux dire par-là que notre oasis au milieu de cette île quasi désertique doit absolument être la démonstration qu’il est possible de reverdir une île avec la production d’eau douce.
Voilà l’île de Maio. Un quasi désert où la production agricole s’était effondrée. Avant d’y réaliser notre projet humanitaire, la quête des insulaires en vue de retrouver une indépendance alimentaire et surtout une activité économique était désespérée. Non pas que les sept mille habitants ne fussent pas résilients. Mais au fil des années, la sécheresse et le cruel manque d’eau finirent par les lasser. Il n’y avait plus de nourriture sur l’île. Des reportages sur le Cap-Vert ont certes montré que cet archipel tente de procéder à la désalinisation de l’eau de mer. Mais dès que l’on s’éloigne de ses usines et donc du bord de mer, soit la désalinisation n’est plus possible soit trop coûteuse. A peine débarqués, nous plantons et bouturons donc les extraordinaires variétés d’arbres fruitiers patiemment glanées.
Ici, c’est un don d’Etienne Brault, un N’guer du Sénégal que je transplante avec joie.
Pourquoi ? Parce que le N’guer, connu scientifiquement sous le nom de Guiera senegalensis, est une plante africaine au fond originaire du Sahel. Pour nous ici, à Maio, elle jouera un rôle important. Il pourra atteindre jusqu’à 3 mètres de hauteur mais j’ai décidé qu’il resterait sous forme de buisson de moins de 1,5 mètre. Là-bas, il joue un rôle capital dans la lutte contre la désertification grâce à sa capacité à pousser dans des sols pauvres et à retenir l’eau. Si je dis qu’une plante est capable de fabriquer de l’eau avec ses racines, c’est bien sûr, une métaphore. Scientifiquement, il n’existe pas de plante qui “fabrique” de l’eau à partir de ses racines. Les plantes absorbent l’eau disponible dans leur environnement par leurs racines. Le N’guer est capable de survivre dans des conditions extrêmement arides en extrayant et en stockant l’eau efficacement. Il peut même irriguer des arbustes proches de lui, du sorgho, par exemple : Guiera. Cela dit, certaines plantes sont particulièrement efficaces pour s’adapter à des environnements secs et peuvent stocker de l’eau dans leurs feuilles, tiges ou racines. Par exemple, les plantes du genre Adansonia, communément appelées baobabs, sont connues pour leur capacité à stocker de grandes quantités d’eau dans leur tronc épaissi pour survivre pendant les saisons sèches. Les feuilles du N’guer sont réputées pour leurs propriétés médicinales, notamment pour traiter la fièvre et diverses autres maladies
Nous mettons en œuvre les techniques agroécologiques de culture d’eau. Que n’a-t-on pas écrit au sujet de l’eau ? MaiOasis est devenu la preuve qu’il est possible de vaincre la sécheresse. L’eau ressource absolument vitale doit être cultivée en mariant savoir-faire ancestral et moderne.
Voilà deux techniques de récupération d’eau parmi une vingtaine d’autres techniques que je vous présenterai prochainement.
350 espèces tropicales
Notre projet grandit. Nous avons planté des avocatiers, baobabs, goyaviers, manguiers, papayers et tant d’autres dans notre jardin de l’Oasis.
Notre pépinière d’arbres tropicaux en tous genres est essentielle au développement de la biodiversité. Nous avons des arbres à pain, cannes à sucre, durian, Jack fruit etc. et naturellement des baobabs. Si je vous parle du baobab, c’est parce que c’est un arbre emblématique de l’Afrique et que j’en plante ici, à Maio. J’aurai quitté notre planète bleue lorsqu’ils auront 25 mètres de hauteur et plus de 20 mètres de circonférence avec un diamètre de 5 à 7 mètres. Ils ont un tronc ventru, souvent décrit comme un « arbre bouteille »” en raison de sa capacité à stocker de l’eau.
Les branches des baobabs poussent de manière irrégulière et sont dépourvues de feuilles pendant la majeure partie de la saison sèche. Les jeunes baobabs développent d’abord une racine pivotante, puis, en vieillissant, le système racinaire devient radial et superficiel, s’étendant beaucoup plus loin que la hauteur de l’arbre Baobab africain lui-même.
Depuis que l’oasis évolue, toutes sortes d’oiseaux arrivent à elle. Ici un magnifique martin pêcheur, mais aussi des faucons. Un nouveau biotope est en train de voir le jour.
Au fond vous ai-je dit que j’ai démarré ce projet dans le dénuement le plus extrême où peu de choses étaient disponibles ? J’avais l’impression d’être littéralement au commencement du monde. Puis, peu à peu, la terre en dormance s’est laissé féconder. Ce rapport à la puissance du principe féminin a été marqué par la résilience des femmes de Maio qui depuis des années de sécheresse font face aux pires épreuves pour que la vie – leur vie ! – continue. C’est surtout avec elles que nous créons main dans la main des jardins nourriciers. En quinze mois, où jadis rien ne poussait, nous avons eu nos premières récoltes.
Mais le plus beau dans tout cela, et qui réjouit particulièrement mon cœur de pionner, c’est que la population autochtone est à nouveau confiante et pleine d’espérance !
à suivre …