Les Napolitains disent que leur ville est d’une telle beauté, qu’une fois qu’on l’a vue, le reste n’a plus aucune importance et que l’on peut mourir en paix. Il est certain que vous pourrez encore et toujours voir Naples. J’en reviens à bord du Star Clipper, un magnifique voilier 4 mâts dont je vous conterai les merveilles que l’on peut découvrir en Italie. Mais, si possible, ne mourez pas à Naples ! Vous avez encore bien d’autres horizons à découvrir… En revanche, je suis désolé de vous confirmer que pour nous, les voyageurs, le monde s’est singulièrement rétréci. En plus de la guerre en Ukraine, le Moyen-Orient est à nouveau prêt à s’embraser. Les compagnies maritimes ont annulé toutes les croisières qui atteignaient des ports au Moyen-Orient qui pourraient constituer un risque pour les passagers.
Insécurité et instabilité
Vous ne pourrez pas contempler de sitôt les demoiselles de Sigiriya.
Ce magnifique pays qu’est le Sri Lanka affronte des violences qui n’avaient plus cours depuis longtemps. Le président sri lankais a fui son pays. Le pays subit encore et toujours (mi-octobre 2023) une guerre civile, une crise politique et surtout économique sans précédent.
Ce pays, en terrible manque de devises étrangères, pourtant nécessaires à financer les importations les plus essentielles à sa population de plus de 20 millions d’habitants, a aussi pratiquement épuisé ses réserves d’essence. Rédhibitoire pour les voyageurs même si c’est un très beau pays.
Instabilité également dans certaines régions du Maghreb du Sud. Quand pourrez-vous à nouveau admirer la complicité de ces deux créatures ?
Sincèrement, je me fais du souci pour la Tunisie que j’adore. Est-ce vraiment le bon moment pour y aller alors que ce pays se trouve aussi en pleine crise constitutionnelle? Instabilité politique et islamisme exacerbé où règne la charia, rendent certains pays de l’Afrique noire infréquentable, parce qu’ils sont devenus le terrain de jeu de groupes de terroristes. Suivant la nationalité du voyageur, son sexe, voire son orientation sexuelle, il peut être exposé à un risque considérable. Les membres de la communauté LGTB risquent même la vie dans certains pays. Tout comme la religion, pratiquée ou non du moment qu’elle est inscrite sur le passeport du voyageur. Encore une fois, guerres civiles en Afghanistan ou au Yémen ou guerre tout court en Ukraine et soudain un embrasement au Moyen-Orient constituent une bande terrestre n’étant plus du tout accessible sans risque. Même pour les voyageurs téméraires! Dans certains autres pays de notre belle planète bleue, l’industrie du kidnapping fait florès. Corruption, appât de l’argent facile, cartels de la drogue et luttes pour le pouvoir sont des fléaux dont les régimes des pays concernés ne pourront pas se débarrasser de sitôt. Mort infernale d’une civilisation ? Le comte de Grandvaux vous en parlera sous peu.
Osons être positifs et constatons qu’il nous reste quand même d’innombrables pays en Europe et ailleurs où il fait beau vivre. Je me suis entretenu récemment avec Dominique Rollin, commandant de bord du Star Clipper à propos de la sécurité à bord. Toutes les compagnies maritimes ont établi un processus de sécurité à bord pour les passagers et qui, bien évidemment, doit rester secret ou du moins très, très confidentiel. Je n’en dirai pas plus mais c’est pourquoi je préfère aussi de loin les voyages maritimes durant lesquels je n’ai pas constamment à défaire mes valises et en voyageant en parfaite sécurité.
Originalité ou nouvelle forme d’aventure?
Si je vous rappelle ces tragédies, ce n’est pas pour vous ficher le cafard. Je ne vais pas vous bassiner avec mes innombrables voyages, mais songeons un instant que voyager, c’est partir à la découverte du monde, de ses paysages, de ses cultures, de ses langues. Voyager, c’est sortir de sa zone de confort, se confronter à l’inconnu. En 2010 Stefan Hessel conseillait de « s’indigner ».
Aujourd’hui, moi, je conseillerais plutôt aux personnes de s’émerveiller.
Voyager est en effet le moyen de vivre des expériences uniques, enrichissantes. En voyageant, vous vivrez des scènes certainement ahurissantes.
Mais aussi de plus paisibles comme le suggèrent ces douces girafes.
Certes, pour nous autres Européens, ce lieu au Botswana est difficilement accessible hors transport aérien. Mais faut-il forcément nous priver de tout sous prétexte que nos voyages nuisent à notre planète bleue ? Certes, les voyages peuvent avoir un impact négatif sur l’environnement et les populations locales. Venise, Barcelone, Dubrovnik, Amalfi souffrent bien évidemment du tourisme de masse. Le surtourisme à Capri provoque une saturation des infrastructures, une augmentation excessive des prix, mais aussi, il faut malheureusement bien en convenir une scandaleuse exploitation des touristes qui veulent découvrir la Grotta d’Azzura. Je n’en dirai pas plus.
A la recherche de l’authenticité !
J’en conviens, l’ouverture au monde, aux horizons lointains m’ont été d’un apport culturel inestimable. J’avoue qu’en ayant fait deux fois le tour du monde, notamment grâce aux paquebots, j’ai longtemps aussi boudé ma proximité. Ou l’espace proche si vous préférez, même si mon lac de Neuchâtel est sublime !
Lac de Neuchâtel vu depuis le village d’Yvonand ©Authentique Evasion
Lui est authentique et tous les jours je m’y ressource. Je suis bien conscient que c’est un privilège quotidien que j’ai là et que tout le monde n’a pas, surtout ceux qui habitent des grandes villes. Moi c’est l’eau qui m’attire et me contente. Pour d’autres, ce sera la montagne ou les voyages en train. J’ai dit et j’ai répété à l’envi que le tourisme de masse ne favorisait pas l’authenticité. Et c’est bien pour cela que j’exhorte les voyageurs à rechercher l’authenticité dans leurs voyages, proches ou lointains. Et surtout de se poser la question : de quoi ai-je envie ?
à suivre
