A nouveau, la bien connue cantatrice ukrainienne-suisse Olga Barben, spinto soprano, se produira aux Planches le 28 octobre 2023. Notre éditeur s’est entretenu avec elle au sujet de ses choix. C’est manifestement une sorte de répétition générale pour ses futures prestations à l’étranger. Boris Perrenoud, chef d’orchestre, sera au pupitre non pas avec sa baguette de dirigeant, mais à l’œuvre pour régler la musique qui l’accompagnera. Lorsque Olga Barben se produira à l’étranger, elle sera sans doute accompagnée par un pianiste de renom.La rédaction
AB : Olga, vous interpréterez plusieurs morceaux emblématiques de l’amour et de la nostalgie. Pourquoi ce choix ?
OB : J’adore la poésie d’un écrivain célèbre Afanasy Fet. Ecoutez comme c’est beau :
Je ne te dirai rien…
Je ne te dirai rien, je ne te regarderai pas, mais je t’aimerai toujours. Avec une force inconnue.
Je ne te dirai rien. Je ne te toucherai pas, mais je sentirai toujours ton souffle sur ma joue.
Je ne te dirai rien, je ne te suivrai pas, mais je saurai toujours où tu es et où tu vas.
Je ne te dirai rien, je ne t’écrirai pas, mais je lirai toujours dans ton cœur comme dans un livre.
Je ne te dirai rien, je ne t’oublierai pas, mais je mourrai toujours en silence pour toi.
AB : C’est très touchant en effet. Les paroles expriment les sentiments d’une personne qui est secrètement amoureuse et qui n’ose pas révéler ses émotions.
OB : C’est tout à fait cela et c’est justement ce que Tchaikovski a mis en musique dans son opus 60 no 2 intitulé « Les étoiles douces brillaient à nous ». Son opus 60 no 2 est la deuxième des Douze romances, un cycle de mélodies pour voix et piano composé en 1886. Cette mélodie est en mi majeur et a un tempo d’Allegretto con moto. La mélodie est écrite pour voix spinto soprano et piano, ce qui convient parfaitement à ma propre voix. J’interprèterai aussi de ce compositeur génial « Non, seulement celui qui connaissait la soif d’amour, peux me comprendre »
AB : Là, on est carrément dans la souffrance. N’est-ce pas difficile à interpréter ?
OB : Pas du tout, je peux facilement interpréter un drame et la souffrance. Je connais très bien ces sentiments forts et intenses, car j’ai vécu cela dans ma propre vie. En même temps, lorsque j’interprète une œuvre je me donne à elle totalement. Je chante ensuite une pièce de Rachmaninov, « Dans le silence de la nuit ».
AB : Vous interprétez ensuite « Matin brumeux », une œuvre d’Erast Abaza, un musicien et poète d’origine égyptienne, sur un poème d’Ivan Tourgueniev. La chanson exprime la mélancolie du narrateur, qui se souvient d’un amour perdu dans la brume du matin.
OB : Là encore, c’est évidemment forcément mélancolique, puisque les paroles en français signifient : Matin brumeux, matin triste. Tu me rappelles le passé. Tu me rappelles le visage de celle que j’ai tant aimée. Elle est partie, elle m’a quitté, Elle a disparu comme un rêve ; Et je reste seul, abandonné, Et je pleure dans le silence. Matin brumeux, matin triste, Tu me rappelles le passé ; Tu me rappelles le visage de celle que j’ai tant aimée.
AB : Au fond, toutes les œuvres que vous nous interpréterez explorent les thèmes de l’amour, du deuil, de la solitude, de la culpabilité et de la reconstruction.
OB : Ah…. La solitude ou tout simplement la liberté. Mais au fond, chacun décide selon son propre point de vue. Nostalgie de la jeunesse, nostalgie d’amour, premier amour, inexpérience, doutes, espoir, passion… quel mix émotionnel (!) ; mais c’est notre vie. C’est tout au moins le thème de mes interprétations.
AB : Je sais que maintenant vous êtes très heureuse en mariage, alors que vous avez vécu des périodes très difficiles. Est-ce pour cela que vous nous interprétez cette nuit, je n’ai pas envie de dormir, je veux danser ?
Olga Barben adore son lac de Neuchâtel, mais au fond elle aime tous nos lacs.
OB : (éclats de rire). Oui, exactement. Dans ma vie quotidienne, je suis très romantique, j’aime et apprécie la vie, comme une optimiste absolue. Donc je ne suis pas du tout mélancolique ou nostalgique. Je n’interprète pas. Je peux vous confier quelque chose d’important (elle sourit avec son regard énigmatique). Le passé n’existe pas dans mon vocabulaire. Je vis toujours au moment présent, ici et maintenant…ma vie de femme heureuse et performante. Et chez moi, en admirant le lac de Neuchâtel, je sais aussi être relaxe, très relaxe…
Mais revenons à la musique. Regardez plutôt
https://www.youtube.com/watch?v=hA9bEKKxTNU
Ce film musical américain est génial.
AB : Audrey Hepburn n’a pas chanté elle-même les chansons du film, mais a été doublée par Marni Nixon, une chanteuse professionnelle qui a également prêté sa voix à Deborah Kerr dans Le Roi et moi et à Natalie Wood dans West Side Story.
OB : Pourtant Audrey Hepburn avait travaillé très dur pour apprendre à chanter, mais les producteurs avaient estimé que sa voix n’était pas assez puissante pour le rôle.
AB : Comme quoi à chacun son métier !