La magie du regard a toujours été un sujet qui a évidemment fasciné notre professeur au grand cœur. Dame ! Voilà bien 40 ans qu’il pratique l’ophtalmologie de pointe ! Dans ce dossier sur les yeux, il commence par ce thème englobant plusieurs aspects, allant de la communication non verbale à l’émotion et à l’intimité. A sa manière enrichissante, il nous raconte les yeux comme personne avant lui. Nous complétons ce dossier par une extrapolation de Sonia Da Fonseca, notre psychologue. La rédaction
Le regard est un outil très précieux dans nos interactions quotidiennes, aptes à créer des liens profonds et significatifs. Par nos yeux, nous communiquons puissamment nos émotions et nos intentions. Que dit le regard de Clara Ponty, cette charmante pianiste parisienne, que j’ai eu une fois l’honneur d’inviter à mon Mas Sant[1], en Espagne ? Elle nous y interpréta ses propres œuvres avec brio. Le regard d’une personne joue un rôle crucial dans la communication entre êtres humains, mais aussi entre humains et animaux. Le regard exprime des émotions, des intentions, mais aussi des pensées. Et tout cela sans nécessairement avoir besoin de mots. Un simple échange de regards peut transmettre des sentiments de joie, de tristesse, d’amour, de colère ou de surprise. Un simple regard peut du reste aussi transmettre des sentiments de confiance, de sécurité ou de peur, et cela souvent de manière plus authentique que les mots ! Par exemple, des pupilles dilatées peuvent signifier l’excitation ou l’intérêt, tandis que des yeux plissés peuvent indiquer la méfiance ou la concentration. Ou encore d’incompréhension.
Nos yeux peuvent donc révéler beaucoup sur notre état émotionnel. Les expressions des yeux, tel un regard triste ou un sourire dans les yeux, peuvent éveiller l’empathie chez les autres, leur permettant de comprendre ce que nous ressentons. Comme mes lecteurs le savent, étant souvent en Afrique ou en Inde, les yeux peuvent cependant avoir un langage différent selon les cultures où l’on se trouve. Ainsi, tandis que dans une culture un regard direct est perçu comme un signe de confiance et d’honnêteté, dans une autre, il peut – au contraire – être considéré comme totalement impoli, voire agressif. C’est à peu près la même chose pour les mots. Alors que dans notre culture francophone, la répétition des mots est un défaut. « Un Africain ne se lasse guère d’entendre et de réentendre la même histoire. La répétition, pour nous, n’est pas un défaut »[2]
Dans notre culture européenne, le regard joue un rôle important dans l’attraction physique. Un échange de regards peut être un moyen subtil de flirter et de créer une tension romantique. C’est pour cela que les yeux sont souvent décrits comme étant « le miroir de l’âme ».
Les yeux
Dans ce dossier, je ne vous décrirai pas d’affections ophtalmologiques particulières comme je le fais dans mes autres articles. J’y ferai juste une allusion. La rédaction m’a en effet demandé de consacrer un article totalement différent et si possible distrayant sur les yeux. Je crois pouvoir y parvenir en vous rappelant les variétés de couleurs des yeux du genre humain. Elles sont principalement déterminées par la quantité et le type de pigments présents dans l’iris.
La couleur marron des yeux est sans nul doute la plus courante dans le monde. On la trouve présente chez environ 80% de la population mondiale. Elle est due à une forte concentration de mélanine dans l’iris.
Les yeux bleus de Clara Ponty, par exemple, contiennent moins de mélanine, ce qui permet à la lumière de se disperser et de donner cette teinte. Savez-vous que 8 à 10 pour cent de la population mondiale seulement a des yeux bleus ?
Les fans de l’actrice et chanteuse suisse Marie Laforêt (décédée en 2019) vous diront qu’elle avait les plus beaux yeux verts du monde. Je suis d’accord avec eux. J’ai eu l’honneur et le plaisir de la côtoyer. Seuls 2 pour cent de la population mondiale ont les yeux verts, ce qui en fait l’une des couleurs de yeux des plus rares. Et à quoi est due cette rareté ? Eh bien à la faible quantité de mélanine dans l’iris ! C’est ce qui donne cette teinte vraiment exceptionnelle, il faut bien le dire.
Il y a encore la couleur noisette des yeux. Cette couleur est un mélange de marron, vert et parfois bleu, donnant une apparence changeante selon la lumière.
Les yeux gris sont également assez rares. Ils résultent d’une faible quantité de mélanine et d’une dispersion de la lumière similaire à celle des yeux bleus.
Il existe également des variations et des combinaisons de ces couleurs où une personne peut avoir des yeux de couleurs différentes. En médecine ophtalmique, on appelle ces cas rares d’hétérochromie.
L’ albinisme
Les personnes atteintes d’albinisme ont des caractéristiques oculaires spécifiques dues à une absence ou une déficience de mélanine, le pigment responsable de la couleur des yeux, de la peau et des cheveux. En fait, lesyeux des personnes albinos peuvent paraître bleu pâle, gris ou même rougeâtre. L’apparence rougeâtre est d’ailleurs due à la visibilité des vaisseaux sanguins à travers l’iris, qui est peu pigmenté. L’absence de mélanine affecte le développement de la rétine et des nerfs optiques, entraînant souvent une acuité visuelle faible et des difficultés à percevoir les détails. Par ailleurs, elles sont très sensibles à la lumière (photophobie) en raison du manque de pigment dans l’iris, ce qui permet à plus de lumière de pénétrer dans l’œil. Elles ont des mouvements involontaires et rapides des yeux. L’albinisme peut malheureusement aussi entraîner des difficultés à percevoir les couleurs correctement, en raison du développement anormal de la rétine. Certes, ces quelques caractéristiques (il y en a d’ailleurs encore d’autres) peuvent varier en intensité d’une personne à l’autre, mais elles sont toutes liées à la déficience de mélanine.
Ces personnes nécessitent souvent une prise en charge ophtalmologique spécialisée pour améliorer leur qualité de vie.
L’hétérochromie
L’hétérochromie est une condition où une personne a des différences de couleur entre ses deux yeux, voire au sein d’un même œil. Lorsque chaque œil a une couleur différente, par exemple, un œil bleu et un œil marron, on parle alors d’hétérochromie complète (iridis) .
On parle d’hétérochromie partielle (iridum) lorsqu’une partie de l’iris a une couleur différente du reste de l’iris. L’hétérochromie centrale se présente lorsque l’iris a une couleur différente autour de la pupille par rapport au reste de l’iris.
La plupart des cas d’hétérochromie sont héréditaires et bénins. Elle peut être présente dès la naissance. Toutefois des blessures à l’œil, des inflammations (telle l’iridocyclite hétérochromique de Fuchs (FHI) [3]) peuvent provoquer une hétérochromie acquise. La FHI peut aussi entraîner un glaucome secondaire. L’hétérochromie est relativement rare chez les humains, affectant moins de 1% de la population. Elle est plus courante chez certains animaux, comme les chats et les chiens.
Les personnes atteintes voient normalement et n’ont pas de problèmes de perception des couleurs.
Il est temps d’aborder une autre dimension fascinante : la diversité des formes des yeux à travers les cultures et les peuples du monde.
La diversité des formes des yeux
Voilà une beauté qui a des yeux dits en amande.
Tels des joyaux délicatement sculptés, les yeux en amande s’étirent avec grâce et s’élèvent subtilement vers les coins externes, évoquant la douce courbe d’une amande.
Cette forme de yeux surtout chez les dames est souvent considérée comme très esthétique et élégante. Du reste, elle est appréciée pour sa capacité à accentuer les traits du visage et à créer un regard séduisant. Pour celles qui se maquillent, les yeux en amande sont très polyvalents en termes de maquillage. Ils peuvent être mis en valeur avec presque tous les styles de maquillage, que ce soit avec un « eyeliner », des ombres à paupières ou des faux cils.
Quelque part en Asie
Les yeux des Asiatiques doivent incontestablement leur forme unique à une harmonie de facteurs génétiques et anatomiques. Le pli épicanthique, – ce délicat voile de peau qui caresse le coin interne de l’œil –est l’une des caractéristiques marquantes. Tel un secret partagé, cette particularité humaine est plus courante parmi les peuples d’Asie de l’Est et du Sud-Est. Ce type d’yeux révèle une beauté naturelle et sereine, semblable à des pétales de lotus qui s’ouvrent doucement à la lumière du matin. Il est vrai qu’on la retrouve aussi chez d’autres groupes ethniques que j’évoquerai au chapitre suivant. Remarquez que la forme des yeux n’a absolument aucun impact sur la qualité de la vision. Il existe de nombreuses subtilités et de multiples nuances.
La diversité des traits physiques est immense, chaque personne possède une singularité qui lui est propre. Chaque forme d’œil possède sa propre beauté et son propre charme, contribuant à la riche mosaïque de l’humanité.
En tant que médecin ophtalmologue, ce que je peux dire sur le pli épicanthique que j’ai évoqué ci-dessus, qui s’étend de la paupière supérieure au bord du nez, est qu’il donne aux yeux une apparence plus étroite et allongée. Il existe plusieurs théories concernant l’origine de cette particularité. Une hypothèse largement acceptée – mais encore contestée par certains scientifiques – suggère qu’ils représentent une adaptation au climat. Les ancêtres des populations asiatiques vivaient dans des régions où la réverbération du soleil sur la neige et la glace était intense. Le pli épicanthique aurait ainsi servi à protéger leurs yeux des rayons UV et des vents froids. Ça, c’est l’hypothèse climatique, si je puis dire. « Si non è vero è ben trovato » diraient les Italiens.
Un certain nombre d’anthropologues auxquels fait partie le médecin Alain Froment (1952) dont une partie de sa carrière s’est déroulée comme la mienne au Sénégal, a exploré la sélection sexuelle comme étant une explication possible pour certains traits physiques, y compris la forme des yeux. Une autre théorie – et non des moindres –, postule que les gènes responsables du pli épicanthique exercent des effets pléiotropes, c’est-à-dire qu’ils influencent simultanément plusieurs traits phénotypiques ou fonctions biologiques. Cette pléiotropie pourrait avoir favorisé la prévalence de ce trait au sein de certaines populations en raison de ses multiples impacts bénéfiques.
Dans quelles régions de notre planète retrouve-t-on cette particularité ?
On la retrouve chez les populations d’Asie de l’Est (Chine, Japon, Corée), en Asie du Sud-Est (Vietnam, Thaïlande), et en Asie centrale.
En Amérique du Sud, certaines populations indigènes présentent cette forme spécifique notamment en raison de leurs ancêtres asiatiques qui ont migré à travers le détroit de Béring il y a des milliers d’années. Les Quechuas et les Aymaras sont principalement présents en Bolivie, au Pérou et en Équateur et montrent assez souvent des traits physiques similaires à ceux des populations asiatiques, y compris au niveau des yeux.
Les Mapuches, peuple indigène du Chili et de l’Argentine peut également présenter des caractéristiques physiques similaires. Ces traits sont le résultat de l’histoire migratoire complexe des peuples indigènes des Amériques (y compris les Inuits).
En Afrique, les plis épicanthiques sont principalement observés chez certains groupes ethniques spécifiques. Les San, également connus sous le nom de Bushmen, sont un peuple indigène d’Afrique australe. Ils sont particulièrement présents en Namibie, au Botswana, et en Afrique du Sud. Les San sont connus pour leurs traits distinctifs, y compris la forme de leurs yeux.
À Madagascar, une partie de la population présente aussi cette particularité, dû à l’ascendance austronésienne de certains Malgaches, résultant de migrations anciennes de populations d’Asie du Sud-Est.
Ces exemples illustrent comment les caractéristiques phénotypiques peuvent varier et se manifester au sein de différentes populations en raison des migrations et des flux génétiques, ainsi que des interactions culturelles au fil du temps.
Les couleurs, nous y voilà…
La perception des couleurs est un processus complexe impliquant non seulement les yeux mais aussi le cerveau, qui interprète les signaux lumineux reçus. L’œil humain est capable de percevoir jusqu’à 10 millions de couleurs. Cette capacité est due aux trois types de cônes présents dans la rétine, chacun sensible à une partie différente du spectre lumineux : les cônes rouges, verts et bleus.
Comment fonctionne la vision des couleurs ?
La vision des couleurs est un processus fascinant qui implique à la fois les yeux et le cerveau. La rétine de l’œil contient deux types de photorécepteurs : les bâtonnets et les cônes. Les bâtonnets sont responsables de la vision en faible luminosité, tandis que les cônes sont responsables de la vision des couleurs.
Il existe trois types de cônes, chacun sensible à une partie différente du spectre lumineux : les cônes sensibles au bleu (ondes courtes), au vert (ondes moyennes) et au rouge (ondes longues). Lorsque la lumière entre dans l’œil, elle est focalisée par la cornée et le cristallin sur la rétine. Les cônes captent cette lumière et la convertissent en signaux électriques. Ces derniers sont ensuite transmis au cerveau via le nerf optique. Le cerveau interprète ces signaux pour créer la perception des couleurs. Par exemple, si une surface reflète principalement des ondes courtes, elle sera perçue comme bleue. Mais la perception des couleurs dépend de la manière dont les trois types de cônes interagissent.
La couleur ‘violet’ est perçue de manière assez complexe. La perception des couleurs, y compris le violet, commence dans l’œil. Le violet est perçu lorsque les cônes sensibles au rouge et au bleu sont activés simultanément. Il se situe à l’extrémité du spectre visible, entre le bleu et l’ultraviolet. Toutefois, il n’a pas de longueur d’onde unique dans le spectre lumineux, et c’est justement ce qui le rend unique parmi les couleurs.
Le cerveau combine les informations provenant des différents cônes pour créer une image colorée cohérente. Ce processus complexe permet de distinguer des millions de nuances de couleurs. La vision des couleurs est donc un bel exemple illustrant comment nos yeux et notre cerveau travaillent ensemble pour nous permettre de voir le monde en couleur.
Et la vision des bébés ?
La vision des nourrissons évolue rapidement au cours des premiers mois. Elle se développe progressivement au cours des premiers mois de leur vie, mais il faut environ six mois pour qu’ils atteignent une vision plus nette et colorée, similaire à celle des adultes. Autrement dit, ils ne voient vraiment bien qu’à partir de six mois. Voici pourquoi. A la naissance, les photorécepteurs (cônes et bâtonnets) dans la rétine ne sont pas complètement développés, d’où leur aptitude limitée à percevoir tant les couleurs que les détails. Ainsi, les nouveau-nés disposent d’une acuité visuelle très faible, soit environ d’1/20e. Ils ne peuvent voir clairement que les objets situés à une vingtaine de centimètres de leurs yeux. Leur vision est floue et ils perçoivent principalement des contrastes en noir et blanc. Le cerveau des bébés continue de se développer rapidement après la naissance, améliorant leur capacité à traiter les informations visuelles De plus avant d’avoir atteint l’âge de quatre mois, les bébés ont du mal à coordonner les images provenant de leurs deux yeux. La vision binoculaire, qui permet de percevoir la profondeur et le relief, se développe en effet autour de quatre à cinq mois. Les bébés commencent vraiment à percevoir les couleurs vers cinq à six semaines, en commençant par le rouge et le vert, puis le bleu et le jaune vers le sixième mois. A cet âge, leur vision est beaucoup plus proche de celle d’un adulte, bien qu’elle continue de s’affiner jusqu’à l’âge de deux ans.
Vision animale et humaine… la différence ?
Parmi les lecteurs de Découverte magazine, nombreux sont ceux qui ont des animaux de compagnie et qui pourraient se poser des questions au sujet de leur vision. Je suis un ophtalmologue pour humains et non pas vétérinaire spécialisé en ophtalmologie[4] pour les chats et les chiens. Laissez-moi quand même vous expliquer les différences qui sont naturellement de taille.
La vision des chiens et des chats
Les chats et les chiens ont une perception des couleurs différente de celle des humains. Ils sont dichromates, ce qui signifie qu’ils possèdent deux types de cônes dans leurs rétines, contrairement aux trois types que nous autres possédons. De ce fait la gamme de couleurs qu’ils perçoivent est beaucoup moins large que la nôtre. Les minets perçoivent principalement les couleurs bleues et jaunes, mais ils ont du mal à distinguer les rouges et les verts. La vision des chiens, elle, est très similaire à celle des chats. Les chiens eux non plus ont du mal à distinguer la couleur verte ; la couleur verte qu’ils perçoivent s’apparente plutôt à du gris. Ils ne distinguent pas bien les rouges, les roses et les oranges.
Cette vision limitée des couleurs est compensée par une meilleure vision nocturne et une sensibilité accrue aux mouvements, caractéristique particulièrement utile pour leurs activités de chasse et de surveillance. Tous les chats ont une excellente vision nocturne grâce à une plus grande quantité de bâtonnets dans leurs yeux. Nous autres humains avons une vision nocturne limitée en raison de la faible densité de bâtonnets dans notre rétine. Mais ce n’est de loin pas la seule raison pourquoi nombres de mammifères ont une vision bien meilleure que la nôtre. Ils disposent encore d’ une couche réfléchissante derrière la rétine appelée tapetum lucidum, qui améliore la sensibilité à la lumière.
Le tapetum lucidum
En latin, cela signifie “couche brillante” ou “tapis lumineux”. Ce terme désigne une structure cellulaire spécialisée présente chez certains mammifères. Le tapetum lucidum tend à se situer derrière ou dans la rétine. Cette structure spécialisée reflète essentiellement la lumière pour permettre un autre cycle de réabsorption dans l’œil. Elle agit donc comme un miroir, réfléchissant la lumière qui passe à travers la rétine, permettant ainsi aux photorécepteurs de capter la lumière une seconde fois. Cette couche réfléchissante amplifie et optimise la lumière ambiante, augmentant ainsi la sensibilité rétinienne et facilitant une vision nocturne efficace. Cela augmente la sensibilité de l’œil à la lumière, ce qui est particulièrement utile pour les animaux nocturnes.
Le tapetum lucidum est dès lors crucial pour les animaux qui chassent ou se déplacent la nuit, leur permettant de voir dans des conditions de faible luminosité où nous, les humains ni verrions pratiquement rien. Parmi ceux-ci, les plus remarquables sont les chats et nombre d’espèces de félins ( y compris les lions, les tigres, les léopards, et les guépards). Parmi ces félins, le lynx possède, lui aussi, un tapetum lucidum. Grâce à lui, le lynx chasse efficacement dans des conditions de très faible luminosité. Les humains et la plupart des singes, tous essentiellement diurnes par nature, sont évidemment dépourvus de tapeta.
Il existe différents types de tapeta dans divers groupes d’animaux.
C’est cette couche qui donne aux yeux des animaux leur éclat caractéristique lorsqu’ils sont éclairés dans l’obscurité, souvent appelé « yeux phosphorescents
L’acuité visuelle
Nous autres humains avons une acuité visuelle élevée. Nous voyons des détails fins. C’est une de nos caractéristiques qui nous avantage dans la lecture et la reconnaissance des visages. A propos de visages, les chats reconnaissent souvent leurs propriétaires par leur voix. Une étude a montré que les chats réagissent différemment lorsqu’ils entendent la voix de leur maître par rapport à celle d’inconnus. Les chats sont très observateurs et apprennent rapidement les habitudes de leurs gardiens, telles les routines alimentaires, ainsi que les interactions spécifiques. Ils peuvent ne pas se fier autant aux visages humains, mais plutôt à une combinaison de voix, d’odeurs et de comportements. Comme les humais, les chiens, eux, savent aussi reconnaître les visages humains. Une autre étude a révélé que des zones spécifiques du cerveau des chiens s’activent lorsqu’ils voient des visages humains, distinctes de celles qui s’activent pour les visages d’autres chiens. Ils sont capables de reconnaître leur maître même dans une foule !
A l’instar de l’aigle, le lynx est souvent considéré comme un symbole de vue perçante. Aujourd’hui, dire que quelqu’un a un “œil de lynx” signifie qu’il ou elle est très observateur et capable de remarquer des détails que d’autres pourraient manquer. C’est un compliment qui souligne la vigilance et l’acuité visuelle ou intellectuelle d’une personne
Pour en savoir davantage sur le lynx, lire :
Le champ visuel
Pour marquer les différences qui existent entre les humains et nos frères et sœurs les animaux de toutes sortes, il me reste encore à vous parler du champ visuel et de la perception des mouvements. Notre champ visuel est d’environ 180 degrés. Nous disposons d’une vision binoculaire. C’est notre capacité de voir un objet avec les deux yeux en même temps. Cela permet à notre cerveau de fusionner les images provenant de chaque œil pour créer une seule image tridimensionnelle. Cette fusion des images est essentielle pour nous, afin de percevoir la profondeur et évaluer les distances. Je vous donne juste deux exemples. Comment ferait un handballeur pour attraper un ballon ou un automobiliste pour évaluer la distance d’une voiture en mouvement sans disposer d’une vision binoculaire ? Lorsque vous utilisez vos deux yeux, vous augmentez automatiquement votre champ de vision global. Malheureusement, certaines personnes ont des troubles de la vision binoculaire, tel le strabisme, Je vous invite à relire mon article sur le strabisme.
Parmi les animaux, certains mammifères ont développé un champ visuel particulièrement large. Pourquoi ? Sans doute afin de mieux détecter les prédateurs ou repérer leurs proies. Ainsi, les chevaux ont l’un des champs visuels les plus larges parmi tous les mammifères terrestres. Leur champ de vision peut atteindre environ 350 degrés, grâce à la position latérale de leurs yeux. Cela leur permet de voir presque tout autour d’eux, à l’exception d’un petit angle mort directement devant et derrière eux.
Les lapins, eux, possèdent également un champ visuel très large, atteignant environ 360 degrés. Cette capacité est cruciale pour détecter les prédateurs venant de toutes les directions. Les vaches, elles, ont un champ visuel d’environ 330 degrés. Quant aux chèvres, elles ont un champ visuel d’environ 320 à 340 degrés. Leurs yeux sont positionnés de manière à maximiser leur capacité à détecter les mouvements autour d’elles.
Ces larges champs visuels sont des adaptations évolutives qui permettent à ces animaux de mieux survivre dans leur environnement naturel. Les prédateurs, eux, par exemple, les lions ont un champ visuel plus étroit, mais en revanche une meilleure perception de la profondeur pour chasser.
La perception des mouvements
Tant chez nous, les humains, que chez les animaux, cette perception est une capacité complexe et variée. La perception des mouvements est une capacité essentielle pour de nombreux animaux, humains compris. Elle permet de détecter et de réagir aux objets en mouvement dans l’environnement, ce qui est crucial pour la survie, la chasse, et la navigation, etc.
Nous, les humains, utilisons la vision binoculaire pour percevoir la profondeur et le mouvement. Nos deux yeux captent des images légèrement différentes, et le cerveau les fusionne pour créer une perception tridimensionnelle. Le système dit des neurones miroirs joue un rôle clé dans la perception des mouvements humains. Il permet en effet de comprendre et d’imiter les actions des autres en activant les mêmes régions du cerveau que celles utilisées pour exécuter ces actions. Nous développons des représentations sensori-motrices qui nous permettent de mieux percevoir et interpréter les mouvements que nous savons réaliser nous -mêmes. Les animaux, eux, utilisent souvent plusieurs systèmes sensoriels pour percevoir les mouvements. Les chauves-souris, notamment, utilisent l’écholocation pour détecter les mouvements dans l’obscurité. Autre exemple : les félins ont une vision très sensible aux mouvements rapides, ce qui les aide à chasser.
Toutes ces différences montrent comment la vision de chaque espèce est adaptée à ses besoins spécifiques et à son environnement et combien mère Nature est exceptionnelle !
Le point de vue de la psy
Le regard, une fenêtre sur l’âme
En tant que psychologue, je suis profondément fascinée par la façon dont les regards humains ont cette capacité unique à transmettre des émotions, des histoires et des états d’âme, souvent sans qu’un mot soit prononcé.
A l’époque, le regard saisissant d’une jeune réfugiée Afghane en couverture du National Géographic a fait le tour du monde.
Sous-titré « Haunted eyes tell of an Afghan refugee’s fear » qui signifie « Les yeux hantés révèlent la peur d’une réfugiée afghane », ses yeux captivent instantanément, transcendant les frontières culturelles et linguistiques, comme s’ils avaient le pouvoir d’exprimer des décennies d’histoire personnelle et collective. Il est étonnant de constater à quel point un simple regard peut nous rappeler que nous sommes tous connectés, indépendamment de nos différences.
Cela rejoint l’expression « les yeux sont le miroir de l’âme », qui incarne parfaitement cette idée. Les yeux, avec leur capacité à refléter les émotions, les pensées et même les peurs ou les désirs les plus profonds, sont perçus comme une sorte de fenêtre sur notre être intérieur. Cela explique pourquoi nous ressentons souvent cette « connexion » instantanée avec une personne simplement en croisant son regard : nos yeux transmettent des signaux invisibles, mais puissants, qui résonnent au niveau émotionnel, parfois bien avant que nous n’émettions des paroles.
Les regards peuvent ainsi transmettre une multitude d’émotions : la confiance, la tendresse, la tristesse, ou encore la colère, mais toujours avec une authenticité difficile à imiter avec des mots.
Sincérité du sourire, les yeux nous trahissent
D’ailleurs, le sourire humain, bien que souvent perçu à travers les lèvres, révèle sa véritable sincérité dans les yeux. Lorsqu’une personne sourit sincèrement, les muscles autour des yeux se contractent, créant des plis subtils, parfois appelés pattes d’oie, aux coins des yeux. Cette réaction est involontaire et fait partie du sourire de Duchenne, un sourire qui indique une émotion authentique, souvent de la joie ou de la bienveillance ! Et nous avons tous cette capacité innée à détecter un sourire sincère ! Les yeux sont donc un indicateur fiable de la sincérité de l’émotion affichée.
C’est cette capacité à transmettre l’invisible qui rend le regard si fascinant et puissant dans nos interactions humaines !
Sonia Da Fonseca
[1] Je vous en ai parlé dans mes confidences (voir https://www.decouverte-mag.com/les-confidences-du-professeur-andre-mermoud/)
[2] Amadou Hampâté Bâ, Amkoullel, l’enfant Peul
[3] L’iridocyclite hétérochromique de Fuchs (FHI) est une forme d’uvéite antérieure chronique, caractérisée par une inflammation discrète et persistante de l’iris et/ou du corps ciliaire.
[4] Ces vétérinaires peuvent diagnostiquer et traiter diverses affections oculaires telles que les ulcères cornéens, les conjonctivites, les glaucomes, et les cataractes.