Nous poursuivons l’interview d’André Mermoud, le professeur au grand cœur (cf. https://www.decouverte-mag.com/silencieux-et-sournois-le-glaucome/.) Et cette sommité mondiale du glaucome nous a fait découvrir bien d’autres sujets en matière d’ophtalmologie., Yves Rebaud a posé pour vous d’autres questions importantes qui n’avaient pas encore pu être abordées, tant le sujet est vaste. Cet entretien-ci est précieux, car André Mermoud nous fait découvrir une autre facette de sa personnalité charismatique et attachante. Pour tous ceux et celles qui n’auraient pas encore suivi les explications lumineuses du professeur André Mermoud, regardez cette vidéo :
Il y aura donc bien d’autres épisodes encore. La rédaction
YR : Vous nous accorderez encore souvent des interviews au sujet du glaucome, car le sujet me paraît inépuisable. Il y a tellement de questions brulantes que je vous poserai ces prochaines semaines au nom de nos lectrices et lecteurs à vous qui êtes LA sommité mondiale du glaucome.
AM : C’est vrai que j’en sais beaucoup concernant le glaucome. Après tout, c’est devenu ma spécialité depuis l’âge de 30 ans. Et maintenant que j’en ai un peu plus du double et que j’ai pratiqué des dizaines de milliers d’actes chirurgicaux un peu partout dans le monde, je ne nie pas que je suis devenu une référence mondiale.
YR : Comment peut-on rester modeste en étant une sommité mondiale ?
AM : C’est même une vertu indispensable ! (Rire). Mais j’ajouterai que la modestie doit être liée à l’humilité. La modestie favorise des relations interpersonnelles plus harmonieuses. Elle implique de ne pas se vanter de ses réalisations ou de ses compétences, ce qui peut éviter les conflits, l’envie et les ressentiments dans les interactions avec les autres. Et puis être humble, c’est aussi reconnaître ses forces et ses faiblesses sans du tout se surestimer mais pas non plus se sous-estimer. Cela permet d’entretenir des relations équilibrées et d’être ouvert aux idées et aux perspectives des autres. La modestie permet d’accepter que nous ne savons pas tout et qu’il y a toujours quelque chose à apprendre.
YR : C’est étrange, car on m’a dit que vous êtes l’inventeur de plusieurs techniques chirurgicales en ophtalmologie et vous continuez d’être modeste ?
AM : Oui ! Je vous donne un exemple. Il y a peu de temps, j’étais confronté à un problème épineux de chirurgie pour un patient. Il se trouva qu’à l’occasion d’un week-end prolongé en Espagne, j’ai rencontré un éminent confrère comme moi chirurgien de l’œil. Dans notre relation amicale, je lui ai confié mon souci. Un ami proche qui était présent dans la propriété de mon confrère espagnol a fait des photos. Pur hasard, du reste, mais regardez.
A ma gauche, après que je lui ai expliqué mon problème, il me fait une esquisse…
Les non-initiés n’y comprendront pas grand-chose. Pourtant, pour moi, ce fut clair. Un trait de génie de la part de mon confrère.
YR : Merci de ce partage personnel, professeur Mermoud. Quelles sont les raisons pour lesquelles la cause précise du glaucome peut être considérée comme inconnue ?
AM : Le glaucome est d’abord une maladie très complexe et multifactorielle. Elle peut résulter de l’interaction de plusieurs facteurs génétiques et environnementaux. Comprendre pleinement les mécanismes sous-jacents nécessite une recherche approfondie et complexe. Il y a ensuite son hétérogénéité. C’est-à-dire que le glaucome englobe un groupe de maladies oculaires qui partagent des caractéristiques communes, mais qui peuvent tout aussi bien présenter des différences significatives. Les différentes formes de glaucome, telles que le glaucome à angle ouvert et le glaucome à angle fermé, peuvent avoir des causes parfois très différentes.
YR : Et cela rend l’identification d’une cause unique plus difficile ?
AM : Incontestablement. Et puis comme je vous l’ai dit l’autre fois, le développement du glaucome est influencé par plusieurs facteurs de risque, tels que l’âge, la pression intraoculaire élevée, l’historique familial, la race et d’autres conditions médicales sous-jacentes. Il peut être difficile de déterminer comment ces facteurs interagissent pour provoquer la maladie chez chaque individu.
YR : Et les symptômes précurseurs ?
AM : C’est là le hic, car dans de nombreux cas, le glaucome ne présente pas de symptômes évidents aux stades précoces, ce qui rend le diagnostic précoce difficile. Il peut passer inaperçu pendant une longue période jusqu’à ce que des dommages permanents soient déjà causés au nerf optique. Cela complique l’identification des causes exactes du glaucome.
YR : Et la recherche alors ?
AM : Je vous en ai parlé lors de l’une de nos rencontre1. La recherche sur le glaucome est en constante évolution et de nouvelles découvertes sont faites régulièrement. Les scientifiques continuent d’explorer les mécanismes sous-jacents, afin de bien mieux comprendre les facteurs de risque, les causes, ainsi que les manière de mieux diagnostiquer et de mieux traiter tant sur le plan médical, les lasers ou la chirurgie. L’objectif est de développer des stratégies de prévention, de diagnostic et de traitement encore plus efficaces.
YR : Vous nous avez parlé de glaucome à angle ouvert ou à angle fermé. J’imagine qu’il y en existe d’autres encore ?
AM : Oui, il y a les glaucomes primitifs qui sont chroniques. Puis il y a des glaucomes secondaires qui sont les conséquences d’affections de l’œil ou de maladies générales, telles qu’une inflammation oculaire, le diabète, les thromboses et bien d’autres pathologies encore. Il existe aussi le glaucome congénital qui touche les nouveaux nés et les enfants touche le glaucome infantile précoce qui touche le nouveau-né, le glaucome infantile concernant l’enfant jusqu’à un an, alors que le glaucome juvénile affecte les enfants plus âgés et les adolescents. Ces formes sont fréquemment héréditaires.
à suivre