Découverte-mag n°14

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Raphaël Gaspéri … la beauté comme idéal

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“La nuit qui vient, étang de Granges” Huile sur toile de Raphaël Gaspéri, 1903 (inv. 50.185.155) © Collection musée Labenche, Ville de Brive ; Cliché Ville de Brive – Brivemag’/S. Marchou

A la suite de son article sur Léon Galand, notre spécialiste ès art, vous propose de découvrir un nouvel artiste du passé : Gaspéri Raphaël (1866 – 1935) peintre et conservateur du musée de Labenche de 1912 à 1935. Comme toujours notre éminente experte nous emmène dans l’univers des peintres comme si nous y étions.

La rédaction

Qui êtes-vous Raphaël?

Raphaël... Italien et artiste dans l’âme, mon père issu des Beaux-Arts de Florence, me choisit ce prénom qui me prédestine à un avenir prometteur. Nous sommes très fusionnels tous les deux. Je le suis partout, notamment, quand il se rend au petit séminaire de Brive où il donne des cours de dessin. J’adore ce silence et cette atmosphère mystique. A 2O ans, un immense vide m’habite. Mon père nous quitte pour rejoindre les étoiles Je décide de ne plus quitter Brive et reprend la direction des cours qu’il dispensait. Je suis un autodidacte. C’est à ce moment-là, que je prends conscience que le Beau et la spiritualité ne font qu’un dans l’Art. C’est une émotion esthétique qui réveille des réactions profondes. Je suis persuadé qu’on accède au Beau par la spiritualité et la pureté.

Eh oui ! Le Beau dans l’Art est un plaisir désintéressé et subjectif.

Mon idéal de beauté, c’est d’éprouver une sensation de plaisir face à des formes, des couleurs. D’ailleurs, on parle beaucoup de la théorie de mon confrère Kandisky sur l’Art et la spiritualité dans l’art.

Mais arrêtons de rêvasser !

Je suis devenu un jeune homme petit et trapu. Mon teint basané et ma chevelure noire trahissent mes origines italiennes. Je déteste me coiffer et conserve mes cheveux ébouriffés sous un chapeau noir au large bord.

Aujourd’hui, je suis prêt à partir au lever du jour avec mon sac à dos et ma pipe à la bouche. La campagne m’attire et je veux profiter de ce spectacle magnifique.

  • Allez ! Où vais-je établir mon chevalet ? 

Arrivé en haut du plateau des Millevaches, je m’installe. La lumière y est magique au petit matin. Les étendues désertes et glacées sont belles. 

  • Je hume l’air. Non ! Que dis-je ! Je respire mon inspiration. Quelle beauté !

Je suis là, serein face à cette merveille de la nature créée par Dieu.

Justement, hier, je disais à mon élève Marie Rose Guillot que « La transmission de la pensée par l’art est comme la transmission de la vie. C’est une œuvre de passion et d’amour ».

Tout à coup, je sens une légère brise effleurer ma joue. Il commence à faire froid sur le plateau. Je décide donc de rentrer pour continuer à travailler dans mon atelier près de mon poêle où j’accroche mes croquis au fusain. Je peux ainsi montrer un trait sûr et faire ressortir différentes sensations avec une palette restreinte au noir. L’intérêt est de savoir maîtriser l’ombre et la lumière. J’y trouve une certaine beauté et poésie. Toutefois, j’ai envie de découvrir les nouveaux peintres à la mode. Ah ! Ces fameux impressionnistes ! J’avoue que les associations de couleurs sont fabuleuses.

Je me mets à la peinture et simplifie mes toiles, les épures. Je considère qu’on ne peut transmettre une émotion que s’il n’y a que l’essentiel sur la toile.

A partir de 1890, Paris me tend les bras pour participer à différents salons où je m’amuse à vouloir montrer des figures limousines traditionnelles et plus précisément le labeur de nos paysans.

Je me fais de très bons amis comme Auguste Rodin et Léon Galand avec qui je passe des heures à discuter.

  • Vous ne trouvez pas que j’ai un côté humaniste comme Courbet ou Caillebotte en voulant montrer la vraie vie de tous les jours ?

Je dois rester réaliste même si je me fous de tous mes titres : conservateur du musée de Brive, directeur de l’école municipale de dessin de cette même ville, membre fondateur de la société des Amis de Collonges, conférencier etc… Je reste avant tout un artiste avec un certain idéal du beau et c’est tout ce qui compte pour moi.

Mon appartenance à l’école félibréenne limousine me pousse à mettre à l’honneur des peintures de femmes en costumes traditionnels avec un visage grave et impénétrable. Passez donc voir le portrait de Cécile Brunerie (1834-1913) ! Qu’en pensez-vous ?

On parle de moi dans la revue Lemouzi : « Signalons aussi, dans le courrier Français, un dessin très réussi de notre compatriote et adhérent, M. Raphaël Gaspéri, paysan limousin,… composition à la plume que l’artiste à dédié à l’Ecole Limousine ». J’ai donné dans cette œuvre toute mon énergie des traits et une habilité de la main mettant en scène un relief saisissant décrivant la figure du modèle avec un tel réaliste et une telle vérité que même les spectateurs ne restent pas insensibles.[1]

Mon amitié avec Rodin m’ouvre les portes de l’Hôtel Drouot qui vend mon dessin du paysan Limousin.[2]

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Le Paysan
Dessin de Raphaël Gaspéri, d’après l’Hermite du musée du Luxembourg

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Dessin de Raphaël Gaspéri, d’après l’Hermite du musée du Luxembourg

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Le temps passe et je reçois chez moi, à Brives, mon ami Léon Galand. Après des heures de discussion sur l’idéal de beauté dans l’art, il effectue mon portrait.

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Portrait de Raphaël Gaspéri, huile sur toile de Léon Galand, 1907 (inv. 5O.185.158), musée de Brive © Collection musée Labenche, Ville de Brive ; Cliché Ville de Brive – Brivemag’/S. Marchou

C’est vrai, je me reconnais bien là. Quand je regarde mon portrait, j’ai l’impression d’être en face d’un miroir et j’y découvre ma joie de vivre dans la façon dont il a su retranscrire mon regard. Il n’a pas oublié mon large chapeau et ma pipe. En dépit de mes malheurs, je reste toujours jovial et optimiste.

à suivre…


[1]Gallica, Lemouzi, 1894, cote A1N3

[2]Hôtel Drouot, vente aux enchères du 3 avril 1895, dessins originaux provenant du courrier Français, expert Ed. Kleinmann, 1895

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