Entre lui et nous, c’est une vraie passion! Sentiment de sécurité et accès à tous nos désirs quand il est à nos côtés. Mais qu’en est-il s’il décide de nous quitter pour une autre bourse plus séduisante? Voilà qu’il réveille en nous des inquiétudes et un sentiment de menace! Et si notre rapport à l’argent en disait long sur notre personne?
Un héritage culturel et intergénérationnel?
A la base, on retrouve la peur de manquer qui nous pousse à stocker de l’argent, de la nourriture, des vêtements…Une peur ancrée en nous, peut-être héritée de nos ancêtres ou transmise lors de notre éducation. Mais lorsqu’on commence à stocker des objets sans valeur, on se rend bien compte que ce n’est plus la sécurité financière qui est recherchée.
Une quête intérieure?
Certains psychanalystes vous répondront que par une accumulation de biens matériels l’on cherche à combler l’insécurité créée par le manque d’affection reçu de la part de notre mère. Ils apaisent notre mécontentement intérieur et permettent de combler des sentiments de vide ou de vulnérabilité. Parfois même, ils gonflent notre égo : « Je possède, donc je suis » ! On rentre alors dans un cercle vicieux: on a besoin de davantage d’argent pour se sentir heureux, car acheter des biens ne donne qu’une satisfaction éphémère. De fait, elle est de moins en moins satisfaisante en raison du principe d’adaptation hédoniste. Alors qu’investir dans des expériences humaines fortes provoque un sentiment beaucoup plus durable de bonheur !
Quel rapport ont les enfants à l’argent ?
Très tôt, les enfants devinent que l’argent a une valeur particulière, comme l’a démontré une expérience de Bruner[1]. Il s’est intéressé à la perception de pièces de monnaies par des enfants issus de milieux sociaux divers. Ils demandent aux enfants d’estimer la dimension: soit d’une pièce de monnaie, soit d’un jeton de carton. Les résultats ont montré que les enfants savaient que la pièce de monnaie avait une signification sociale, sans ambiguïté. Tous les enfants ont eu tendance à surestimer la taille des pièces, estimant qu’elles avaient plus de valeur, plus d’importance, et ce d’autant plus que la valeur réelle de la pièce était grande. Les estimations relatives aux pièces de carton quant à elles étaient plus justes. On constate aussi que les enfants issus d’un milieu favorable sont plus proches de la réalité dans leur estimation de la taille des pièces. Au contraire, ceux d’un milieu défavorisé ont une tendance plus importante à la surestimation, car pour eux l’argent a une valeur encore plus importante.
Et les animaux?
En Thaïlande, il arrive fréquemment que les touristes soient victimes de vol d’objets par les singes. Curiosité de la part de ces malins primates? On peut en douter quand on constate qu’ils rendent volontiers l’objet de leur butin si on leur donne en échange une quantité de nourriture qu’ils estiment suffisante par rapport à la valeur de l’objet.
En observant spécifiquement une de ces tribus de primates sur une île isolée, des scientifiques [2] ont fait des découvertes intéressantes. Alors que les singes les plus jeunes volent sans distinction tout ce qui est le plus facilement à leur portée: sac en plastique, vêtements, etc…, les singes plus âgés quant à eux se focalisent sur les appareils photo et les téléphones portables. En effet, ils ont appris qu’ils pouvaient tirer de ce butin une bien plus grosse quantité de nourriture en échange. Ils font ensuite l’apprentissage aux plus jeunes en leur apprenant quels objets sont les plus juteux. On pourrait croire que c’est là l’origine de l’expression « payer en monnaie de singe » ? [3]
Pourquoi est-ce si difficile de se détacher de l’argent?
Le marketing connaît bien nos failles et s’efforce d’entretenir en permanence notre insatisfaction pour susciter de nouveaux désirs qui nous poussent à dépenser pour des biens dont on n’a pas fondamentalement besoin. En parallèle, nos fragilités affectives nous poussent à remplacer ce dont on a manqué par des possessions sécurisantes.
Comment améliorer son rapport à l’argent?
Il est important d’essayer de découvrir quelle est la valeur affective que vous donnez à l’argent. Quel besoin comble-t-il? Que remplace-t-il? Finalement, qu’est-ce qui se cache derrière l’argent?
Ainsi, vous pourrez minimiser son importance, car il aura moins de valeur affective à vos yeux!
NDLR : Sonia da Fonseca notre psy attitrée nous parlera bientôt de chrométophobie[4] Contributrice appréciée de nos lecteurs, retrouvez-la sur www.psyaroma.com.
[1] Bruner, J. S., & Postman, L. (1948). Symbolic value as an organizing factor in perception. The Journal of Social Psychology, 27(2), 203-208.
[2] Brotcorne, F., Giraud, G., Gunst, N., Fuentes, A., Wandia, I. N., Beudels-Jamar, R. C., … & Leca, J. B. (2017). Intergroup variation in robbing and bartering by long-tailed macaques at Uluwatu Temple (Bali, Indonesia). Primates, 58(4), 505-516.
[3] C’est évidemment faux. En réalité cette expression typiquement française signifiait payer en nature. Au XIIIe siècle, le roi de France Louis IX, décida qu’il faudrait payer une taxe pour emprunter le pont qui, à Paris, reliait l’île de la Cité à la rue Saint-Jacques. Il avait toutefois prévu une seule exception à cette règle: les forains, bateleurs ou jongleurs qui possédaient un singe pouvaient, en guise de paiement, faire faire son numéro à leur animal. C’est cette forme de paiement particulier qui a donné naissance à notre monnaie de singe.
[4] Phobie ou obsession, l’argent est malheureusement souvent source d’anxiété de tous genres.