Le professeur de médecine André Mermoud n’est pas seulement un spécialiste du glaucome mondialement reconnu (cf. https://decouverte-mag.com/vision-for-all-andre-mermoud-le-professeur-au-grand-coeur/) mais évidemment aussi un ophtalmologue appliquant la pointe de la technologie médicale en la matière.
Nous avons tous des yeux et sommes donc concernés par les progrès de cette médecine des yeux. Mais l’ophtalmologie reste un mystère pour beaucoup de monde. Or, peu de patients posent des questions à leur ophtalmo.
Vous pourrez donc suivre soit dans nos rubrique Bien-être et santé ou Science et conscience les précieuses informations qu’André Mermoud nous donne. C’est pour cette rubrique qu’Yves Rebaud, – notre journaliste scientifique – a interviewé ce grand spécialiste des maladies des yeux.
La rédaction
Yves Rebaud (YR): Professeur, il existe sans nul doute plusieurs actes chirurgicaux ophtalmologiques pouvant être effectués à l’aide de robots, n’est-ce pas?
Professeur André Mermoud (AM): Jadis, on pensait que la robotique permettrait seule d’effectuer des actes avec un degré élevé de précision et de contrôle, grâce à l’utilisation de robots chirurgicaux. Cette prédiction est dépassée maintenant, car depuis, la micro-technologie a fait des progrès fabuleux.
YR : Dites-nous-en bref ce que c’est.
AM : La micro-technologie ophtalmique est un domaine de la technologie médicale qui se concentre sur le développement de dispositifs miniaturisés de traitement de la vue. Elle comprend des technologies, tels que les lasers, les micro-instruments chirurgicaux et les endoscopes pour effectuer des interventions mini invasives.
Elle sert à améliorer la vision et traiter les problèmes oculaires, tels que la cataracte, la myopie, la presbytie et la dégénérescence maculaire. Les exemples de technologie de la micro-technologie ophtalmique incluent les lentilles intraoculaires, les dispositifs de stimulation rétinienne.
YR : Autrement dit, ce ne sont que des aides auxiliaires ?
AM : Oui, elles permettent d’améliorer le confort visuel ainsi que des implants visant à drainer l’humeur aqueuse dans le cadre d’un glaucome ( voir : https://www.decouverte-mag.com/silencieux-et-sournois-le-glaucome/ ). Il importe de noter que la plupart des chirurgies de l’œil restent encore réalisées par les chirurgiens manuellement.
YR : J’ai entendu parler d’un semi-robot phacoémulsifiant. Pouvez-vous nous en dire davantage ?
AM : Volontiers. Il s’agit d’un type de robot utilisé pour effectuer une chirurgie de la cataracte. Il utilise une technique d’ultrasons, de laser ou de micromouvements pour briser la lentille cristallinienne et éliminer les fragments.
YR : Vous parlez de technologie de micromouvements. Que faut-il comprendre ?
AM : La technologie de micromouvements en ophtalmologie se réfère à une technique utilisée lors de la chirurgie de la cataracte. Son objectif est de minimiser les mouvements involontaires du patient qui pourraient perturber l’opération. Cette technique utilise une plate-forme de stabilisation pour maintenir la tête du patient en place, tout en permettant des mouvements de micromouvements. Cette plate-forme est équipée de capteurs qui enregistrent les mouvements involontaires et les compensent en temps réel. Le chirurgien peut alors effectuer des incisions précises et réaliser une extraction de la cataracte avec une grande précision, tout en minimisant les risques de complications. Les patients subissent moins de traumatismes pendant la procédure et récupèrent plus rapidement après l’opération.
YR : Et la vitrectomie ?
AM : La vitrectomie c’est l’ablation du vitré (le gel aqueux qui remplit les ¾ de l’œil). C’est une technique chirurgicale permettant d’avoir accès à la rétine. L’opération consiste à éliminer le vitré à l’aide de tout petits instruments qui pénétreront dans l’œil par des orifices d’une taille inférieure à 1 mm.
YR : Une telle intervention chirurgicale nécessite-t-elle une hospitalisation ?
AM : Non. La plupart des interventions s’effectuent en milieu ambulatoire. Il n’y a que dans des cas tout à fait exceptionnels, par exemple, lorsque le patient n’a plus qu’un seul œil valide, qu’une hospitalisation de 1 à 2 jours est fortement recommandée.
YR : Je vois (rires) ! Et qu’en est-il de la robotisation dans votre domaine de l’ophtalmologie ?
AM : On en distingue pour la chirurgie de la cataracte et de la réfraction et pour la chirurgie de la rétine. Pour les problèmes de la cataracte et de la réfraction, il y a plusieurs systèmes : Intralase, LenSx, etc. Pour la chirurgie de la rétine, CentraSight est un système robotique performant.
YR : Oulah! Compliqué ça!
AM : (rire) Pas tant que ça. Mais il est très important de dire que tous ces systèmes robotiques de chirurgie ophtalmique sont utilisés en complément de la compétence et du jugement du chirurgien. Le système IntraLase est un laser femtoseconde utilisé pour créer des incisions précises dans la cornée selon que le chirurgien fasse une opération de la cataracte ou une chirurgie réfractive.
YR : Dites-nous ce qu’est un laser femtoseconde ?
AM: Le laser femtoseconde émet des impulsions d’une durée très courte (femtoseconde1) pour créer des incisions ultraprécises et contrôlées dans les tissus mous, notamment dans la cornée. Cette technique permet de réduire les risques de complications et d’améliorer les résultats pour les patients. Notez qu’on l’utilise aussi pour la chirurgie de réfraction.
YR : Qu’est-ce qu’au juste la chirurgie de la réfraction ?
AM : La chirurgie de réfraction, également appelée chirurgie de correction de la vision, est un ensemble de techniques chirurgicales utilisée pour corriger les anomalies de réfraction de l’œil, telles que la myopie, l’hypermétropie et l’astigmatisme. Dans certains cas de presbytie, on l’utilise aussi. Il s’agit de s’affranchir de la dépendance au port des lentilles de contact ou des verres de lunettes. Nous reparlerons des types de techniques qui existent.
YR : Génial ! Quand je pense à ma grand-mère qui portait encore des lunettes en cul de bouteilles si j’ose dire et qui me faisaient très peur quand j’étais petit. Cela lui faisait des gros yeux.
AM: C’était sans doute dans les années soixante du siècle dernier.
YR : (soupir) Cela ne me rajeunit pas…
AM : Depuis, l’ophtalmologie a fait un bond prodigieux sans même oublier les progrès fulgurants qu’elle a fait depuis une vingtaine d’années.
YR : Dommage que ma grand-mère qui était myope comme une taupe n’ait pas pu profiter de cette technologie qui n’existait pas encore de son temps. Et je commence à comprendre pourquoi les patients n’osent pas poser des questions à leur médecin.
AM : Pourtant nous sommes là pour ça. J’expliquerai à vos lecteurs quels sont les autres systèmes semi-robotiques ou les instruments pour chirurgie en 3 D qui peuvent être utilisés en ophtalmologie, car il est important pour eux qu’ils comprennent bien tous les enjeux.
à suivre…
En apparté, le professeur au grand cœur ainsi dénommé par notre magazine Découverte me confie :
« Vous aurez vu que dédier mon art médical aussi aux pays en voie de développement est une constante de mon existence. Je m’en réjouis tous les jours. Je continue à enseigner la chirurgie du glaucome dans plus de 60 pays. Sans compter les centaines de conférences données tous azimuts depuis plus de 10 ans.
J’adore construire des hôpitaux en Afrique (Certains détruisent d’autres construisent! – Découverte MAG (decouverte-mag.com)
ou en Inde !
Je conclus : En plus du professeur au grand cœur, vous êtes alors l’ophtalmo globe-trotter. Et nous rions tous les deux de bon cœur !