Essayer de voir le monde à travers nos yeux, nos émotions, nos connaissances de la vie et notre cerveau félin est tout un art que vous, les humains, ne possédez pas nécessairement. Est-ce que vous vous rendez compte que nous les chats ne vivons pas dans le même univers sensoriel que vous autres humains ? Normal après tout ! Il faut des clés pour pouvoir pénétrer dans notre royaume. Je vous ai appris un tas de choses qui nous concernent. Il est vrai aussi que de plus en plus études scientifiques confirment plus ou moins ce que je vous révèle, mois après mois.
Nos congénères vivant dans la nature – et donc pas du tout dans votre univers, à vous les humains –, ont une espérance de vie de 3 à 4 ans. Et pourtant avec un programme génétique identique, nous, les chats qui vivons dans votre monde à vos côtés atteignons jusqu’à quinze à vingt ans d’existence. A condition bien sûr de ne pas se faire écraser par un véhicule ni d’attraper une maladie.
Claude Béata, un éminent vétérinaire dont mon humain présentera sous peu son fabuleux bouquin1 pense qu’il vaut la peine d’explorer un monde chat, différent de votre univers. De plus, toutes les personnes ayant vécu avec plusieurs chats vous confirmeront ce que presque chaque fois, je vous répète : votre chat est unique en son genre !
Voyez-vous, nous les chats, sommes à la fois prédateur et proie. Ce vétérinaire hors du commun dit que c’est la première clé pour nous comprendre. Il y a bien d’autres clés, d’ailleurs, pour apprendre à nous connaître. Donnez-nous la faculté de nous organiser à notre guise et vous aurez la base de notre équilibre. Si vous vivez avec un de mes congénères, vous devez connaître non seulement quels sont ses besoins, mais aussi ses goûts.
Moi, par exemple, je préfère la nourriture humide aux croquettes. Toujours est-il que j’en mange des deux sortes. Alain mon humain a compté que je m’accorde jusqu’à 17 petits repas par jour. Et j’adore la pâtée spéciale pour chiens de mon pote Oxo. Pourtant, il y a une chose qui me rend véritablement foldingue, c’est lorsque Alain ou Sonia m’offrent de temps à autre du thon. Je vous dirai une prochaine fois pourquoi. Et le plus étrange, c’est qu’Oona ma maman le snobe complètement. Quand je vous dis que chaque chat est unique…
Lorsque les chatons jouent et à condition que leur développement ait été normal, ils sont aptes à contrôler leur bouche et leurs griffes. Moi, ma maman Oona m’a appris depuis mon plus tendre âge à mimer la prédation. C’était un jeu. Oona m’a donc inculqué avec beaucoup de fermeté et constance le contrôle des griffes et des dents. Voilà pourquoi je ne plante pas mes griffes ni mes dents n’importe quand. Encore que…
Je laissais alors entendre qu’un chat caressé qui mord et griffe est un phénomène totalement incompréhensible aux humains que vous êtes. Lorsque vous subissez cet acte de la part de votre chat, vous êtes même scandalisé(e). Il vous a demandé le contact et comme récompense, il vous griffe et vous mord. D’aucuns diront alors que nous, les chats, sommes des créatures sournoises. Ben oui, c’est que vous n’y avez rien compris !
Parfois, nous n’aimons pas être touché ni être pris dans les bras. C’est tout !
A propos d’Oona, je mentionne souvent ma maman, car je donne des exemples sur mon enfance et mon éducation. Je suis né dans la maison que je n’ai jamais quittée. Claude Béata que j’ai mentionné plus haut, confirme ce que j’ai toujours dit. Chatons, les mamans nous reconnaissent et elles ont avec nous un comportement des plus particuliers dès les premières semaines de notre existence. Seulement au bout de quelques mois, la relation maternelle s’estompe pour disparaître pour de bon. Ainsi de fils d’Oona, je suis devenu Aladin le Malin, l’adulte comme n’importe quel autre chat. Tandis que c’est absolument normal dans notre monde, c’est totalement incompréhensible pour vous, les humains. Tant et si bien qu’il arrive que nous nous disputions la place à l’ordi près d’Alain.
Feulement, cris, poils qui s’envolent s’ensuivent. Mais ce n’est pas bien terrible. Ni elle ni moi ne souffrons d’un déficit d’autocontrôle ou de tendance anxieuse. Cela, créerait à coup sûr des conditions d’un mal-être pour nous deux et pour nos humains.
Une heure après, nous nous frottons mutuellement le nez. Accomplir ce geste mutuel est du reste un comportement absolument courant chez nous. Mais cette espèce de salut a plusieurs significations. Ailleurs, dehors par exemple, avec d’autres congénères, nous échangeons ainsi des informations olfactives essentielles, comme l’endroit où nous sommes allés, ce que nous avons fait, ou si nous sommes en en bonne santé.
Pour nous autres, le frottement de nos nez est aussi un signe de confiance et de sécurité. En nous frottant le nez, nous nous rendons vulnérables l’un à l’autre et nous nous montrons ainsi que nous n’avons pas peur de l’autre. C’est une manière de marquer notre territoire et de nous imprégner de l’odeur de l’autre. Nous avons des glandes odoriférantes sur notre face. Celles-ci libèrent des phéromones d’apaisement et de familiarisation. En nous frottant le nez, nous déposons ces phéromones sur les objets ou les sujets marqués, ce qui crée un sentiment d’appartenance et de cohésion . Cela peut aussi être suivi d’un toilettage mutuel, qui renforce le lien social entre nous. Mais j’avoue que je n’ai pas eu souvent ce lien social avec Oona.
Si le vôtre se frotte le nez contre vous, c’est qu’il vous considère comme un membre de sa famille et qu’il veut partager son odeur avec vous. C’est aussi une manière de vous dire bonjour et de vous montrer qu’il vous fait confiance. Vous pouvez lui rendre la pareille en lui offrant le bout de votre doigt à toucher, ou en lui caressant doucement la tête. Bref, Jennifer, ma véto, appelle cela des apaisines qui existent dans toutes les espèces de mammifères. Mais on n’en sait guère plus. Alors je vous en dirai davantage au sujet de ces mystérieuses molécules dès que les chercheurs se seront penchés là-dessus.
[1] « La folie des chats » aux éditions Odile Jacob, 2022