A voir le mercredi 21 juillet 2021 à l’Open Air de Vevey, à partir de 21h45.
Retour à la nature dans les très vastes paysages de l’Ouest de la grande Amérique. Fern, interprétée par la talentueuse Frances McDormand, aujourd’hui sexagénaire, y raconte sa vie.
Sa maman prétend qu’elle est sans abri. Est-ce vrai? Non, bien sûr. Elle n’est pas sans abri. Elle n’a juste plus de maison. Plus de mari non plus. Il est décédé. Ni de travail. Elle a été licenciée. Or, pour les Américains, avoir une maison, avoir un job, gagner beaucoup d’argent, c’est disposer d’un statut social enviable. Être en rupture avec les standards de la société américaine pour laquelle l’apparence compte énormément, c’est être une looser. L’excellente réalisatrice Chloé Zhao – qui n’en n’est pas à son premier long métrage –, ne nous montre certes pas ce que c’était d’avoir une maison lors de la crise américaine des subprimes. Mais on peut dire qu’elle mélange astucieusement fiction et documentaire. Déjà Michael Moore, en 1999, en sortant son documentaire The Big One , nous montrait l’appauvrissement de certaines tranches de la population aux États-Unis, victimes des pratiques douteuses de certaines multinationales qui fermaient soudain leurs portes. Il en va de même pour Fern. La cité ouvrière du Nevada, dans laquelle Fern vivait avec son époux s’effondre, économiquement parlant. Elle est donc contrainte à se mettre à la recherche de petits boulots en sillonnant les routes de ce vaste Ouest américain. Elle n’a que son van qui n’a d’ailleurs plus guère de valeur, mais auquel elle tient beaucoup, car elle l’a aménagé avec amour. Fern devient donc nomade des temps modernes. On y découvre une solidarité exceptionnelle.
Il est connu pour être une source d’inspiration pour des milliers de personnes qui adoptent un style de vie minimaliste et nomade centré sur le vandwelling
Ces nouveaux nomades ayant abandonné le roi dollar s’entraident. Pratiquent le troc. Ils vivent aussi avec un strict minimum. Fern, dans sa sublime interprétation, nous fait voir que l’intense liberté dont elle jouit repose pourtant sur un équilibre des plus fragiles. Elle souffre du froid. Elle a des problèmes de santé. Elle manque de place, car le van de Fern n’est pas grand. Il tombe aussi en panne et coûte de l’argent à Fern qui ne s’attendait pas à une telle dépense. Puis, ce genre de vie nomade engendre un sentiment de solitude, bien que l’entourage de Fern exprime une belle solidarité. Elle a la nostalgie de sa sœur et souffre de l’éloignement des personnes aimées. Qu’est-ce que la famille ? Fern pourra-t-elle s’en éloigner pour toujours ? Et la vie amoureuse? Chloé Zhao laisse entrevoir un futur amour possible entre Fern et Dave. Ce film bouleversant montre qu’aux Etats-Unis en dépit du slogan de l’ancien président Donald Trump – Make America Great Again –qu’il y a des milliers de vie humaines laissées en rade. Des humains qui n’ont pas d’autre choix que de se loger dans leur véhicule quel qu’il soit et de partir vers des régions beaucoup plus avenantes, bienveillantes et souriantes.
Pourquoi l’actrice interprétait son rôle sous le prénom de Fern? Bien que ce soit un prénom commun aux Etats-Unis d’Amérique, en analyse ésotérique, ce prénom signifierait spiritualité, réflexion, analyse de soi, philosophe, secret, mystique, sagesse et surtout solitude. Quant à savoir qui l’a choisi, Chloé Zhao ou Frances McDormand? Mystère! Ce que l’on sait en revanche, c’est que l’actrice a vécu nombre de mois dans un van avant de jouer son rôle et c’est encore elle qui l’a proposé à la réalisatrice.
Pour accompagner ce long métrage, le compositeur et pianiste bien connu Ludovico Einaudi marque une simple mélodie pianistique par vagues régulières, afin de soutenir les déplacements de Fern. Le voyage intérieur de Fern en marge de la société américaine actuelle est des plus mélancoliques.
[1] Quant à Bob Wells, il est une source d’inspiration pour de milliers d’Américains adoptant un style de vie très minimaliste et vivant dans une fourgonnette comme Fern.