Trésors cachés de Toscane 

Cascade du moulin Saturnia

Par Roger Juillerat 

Le surtourisme fait des siennes. Les lieux touristiques sont submergés par un afflux massif de visiteurs, au point que cela devient nuisible pour l’environnement et les populations locales. Roger Juillerat, notre journaliste, personnage hors du commun, nous révèle une tout autre facette de la Toscane. « Beaucoup plus authentique et préservée », nous dit-il. La Toscane regorge en effet de trésors cachés et ce loin des foules touristiques. La rédaction 

Ne nous voilons pas la face. Le surtourisme existe bel et bien aussi en Italie, Venise, Rome et Naples en sont des exemples. On pourrait même aussi en déceler un dans les centres les plus connus de cette si belle Toscane, tout au moins à certaines périodes de l’année : Florence, Sienne, Pise, Luca (Lucques). Leur riche patrimoine et leurs musées font le bonheur des touristes. Pour vous chère amie lectrice, cher ami lecteur, je laisserai ces centres touristiques de côté. Dans ses collines et ses campagnes, la Toscane regorge de beautés et de charmes. Permettez-moi de vous révéler une tout autre facette de cette Toscane, si fascinante et ô combien plus authentique et préservée. Vous dirais-je tout le bonheur que vous connaîtrez comme moi de rejoindre ces villages perchés abritant tout autant de trésors d’architecture, d’art et d’histoire mais loin des foules.  Les villages perchés offrent des vues panoramiques sur les vastes étendues des plaines et permettent à la Toscane préservée d’exprimer toute sa beauté. Evidemment, je ne saurais les énumérer tous, ces petits villages toscans.  

Pitigliano, © Roger Juillerat  

Les trésors de Pitigliano 

Pitigliano est surnommée la « Petite Jérusalem » en raison de sa longue histoire de la communauté juive qui s’y est installée à partir du 15e siècle. Il est dominé par un imposant château médiéval et possède des belles églises et demeures anciennes. Vous vous y promènerez dans ses ruelles, vous admirerez la magie et le charme de ce joyau perché et en visitant le musée de la Culture juive, la Synagogue. Vous y accéderez par un sentier évocateur. Vous y verrez un ancien four où était cuit le pain azyme, une cave creusée dans le tuf où était produit le vin kasher. Vous y percevrez également un fort ancien bassin, servant de mikvé dans le  

Judaïsme. Le mikvé est un bassin d’eau naturelle ou de pluie, dans lequel les femmes s’immergent complètement pour se purifier après leurs règles ou après la naissance d’un enfant. Auparavant, vous aurez également visité le Palais Orsini, un imposant bâtiment rénové entre le 15e et le 16e siècle, abritant le musée éponyme et le Civico Archeologico. Ces derniers renferment quelques petits trésors.  

Sovana est un petit village connu pour ses ruines étrusques, y compris une nécropole impressionnante avec des tombes creusées dans la roche. Il peut se targuer d’une magnifique cathédrale romane et de son palais épiscopal. Les Étrusques sont d’origine incertaine, avec des théories suggérant des racines autochtones ou des influences orientales. Leur civilisation a atteint son apogée entre le VIIIe et le Ve siècle avant J.-C., dominant des régions comme le Latium, la Campanie et la plaine du Pô. 

Voici la petite cathédrale de Sovana, majestueuse par sa simplicité  

Allez savoir pourquoi ?  

Dans le parc archéologique de Sovana, je m’arrête devant le panneau qui me fournit des informations totalement incompréhensibles au sujet de la tombe de Hildebrand. A y perdre son étrusque, vous dis-je. En fait, cette tombe, découverte par l’archéologue britannique George Dennis en 1843, fut nommée Tomba Pola. Il y a 99 ans, en 1925, elle fut renommée Tomba Ildebranda, par l’archéologue Gino Rosi. Mais pourquoi Diable a-t-on rebaptisé ce monument monumental (si, si j’ai voulu le pléonasme !) ? Pour honorer Ildebrando da Savona, devenu pape sous le nom de Grégroire VII, nous dit-on  

Pourquoi, en 1925, s’inspirer dupape Grégoire VII, né vers 1015 justement à Sovana ? Grégoire VII renforçant ô combien l’autorité papale, n’est-il pas devenu l’un des papes les plus influents de l’histoire de l’Église catholique, régnant de 1073 à 1085 ? Il luttait férocement contre le mariage des prêtres. Notez que j’ai peut-être une piste. L’Italie était sous le régime fasciste de Benito Mussolini. Il avait pris le pouvoir en 1922. En 1925, le parti national fasciste était déclaré unique. Le dictateur italien cherchait à tout prix à établir des relations avec l’Église catholique. Or, en 1925, le Vatican organisa la plus grande exposition missionnaire jamais réalisée, visant à montrer la puissance et l’universalité de l’Église catholique dans un contexte de sécularisation croissante. Si non e vero e ben trovato, n’est-ce pas ?  

Des propriétés curatives 

Sorano est perché sur une falaise de tuf et se distingue par son château Orsini et les ruines d’une ancienne forteresse. Dans une atmosphère paisible et authentique, le territoire de Manciano est connu pour ses sources thermales, qui attirent de nombreux visiteurs en quête de détente et de bien-être. Les eaux chaudes sulfureuses de Saturnia sont réputées pour leurs propriétés curatives et sont entourées de paysages magnifiques et il ne faut surtout pas manquer d’aller se baigner vers la cascade naturelle du Moulin de Saturnia où l’eau a formé des petits bassins. C’est extra. 

Porte d’entrée du volcan 

Les origines de Semproniano remontent à la période de la République romaine, quand la famille de Tiberius Gracchus a quitté la capitale et est venue dans ce village pour fonder la colonie de la Ferme de Simpronianum. C’est le plus méridional des villages du Monte Amiata, la porte d’entrée du volcan pour ceux qui arrivent du sud, de Saturnia et de ses thermes, par la route Aurelia. Fief de la famille Aldobrandeschi avant l’an 1000, il passa sous la domination de Sienne au milieu du 14e siècle, et finalement, après un passage sous les Espagnols, fit partie du Grand-Duché de Toscane. Il allie le charme d’un village pittoresque à la beauté de la nature la plus authentique et la plus sauvage du Sud de la Maremme, comme en témoignent les réserves naturelles situées dans ses environs, les rivières, les particularités botaniques. 

Roccalbegna semble être sorti d’un roman fantastique avec sa forteresse audacieuse reposant sur une sorte de rocher cyclopéen qui domine la poignée de maisons composant le village. Ancienne possession de la famille Aldobrandeschi, dont le Palais se trouve à Grosseto, la capitale provinciale, puis passé à la République de Sienne, il est devenu le fief du Mont Amiata de la famille Médicis, et ensuite du comté de Santa Fiora. Ce n’est qu’au XVIIIe siècle que Roccalbegna devient une commune libre du Grand-Duché de Toscane. Aujourd’hui c’est un lieu qui enchante, riche d’histoire, d’art, de nature et de traditions. 

Paradis de la biodiversité 

En regagnant la plaine, il faut s’arrêter à Castiglione della Pescaia et aller faire une petite excursion dans la réserve naturelle Diaccia Botrona, un paradis de la biodiversité. Elle s’étend sur plus de mille hectares et est considérée comme la zone humide la plus importante d’Italie. On y trouve des plantes lacustres : roseaux, joncs et carex, mais aussi une quinzaine d’espèces d’orchidées, certaines particulièrement intéressantes pour leur beauté et leur rareté. Et quelques fragments de la vaste forêt qui recouvrait autrefois la majeure partie de la plaine de la Maremme, formée de frênes, d’ormes et de tamaris. C’est un paradis pour les passionnés de l’observation d’oiseaux, avec plus de 200 espèces recensées tout au long de l’année. 

Le « Far West » de la Toscane 

La Maremme, c’est aussi cette région côtière particulièrement réputée pour sa beauté sauvage et préservée. Son parc régional, d’une surface de 9800 hectares, est un territoire refuge de mammifères et d’oiseaux. Il est habité par les butteri, représentants de traditions séculaires, des éleveurs qui traversent à cheval les étendues marécageuses guidant leurs troupeaux de vaches aux longues cornes recourbées tout au long des pâturages du littoral.  

On peut penser à un « far west » à la toscane où les visiteurs peuvent faire des promenades à cheval, en calèche,  

à vélo, en canoé et même à dos d’âne pour les enfants. Et ses plages avec des dunes de sable sont idéales pour les amateurs de tranquillité et de nature sauvage, loin de l’agitation des stations balnéaires plus fréquentées. 

On citera encore Orbetello, charmante ville située sur une presqu’île et connue pour sa lagune. Celle-ci est aussi un écosystème protégé abritant une grande variété d’oiseaux et de plantes. Les visiteurs peuvent l’explorer en kayak ou en bateau, et observer la faune et la flore locales. Les tomboli Feniglia et Gianelle sont deux plages magnifiques situées à proximité de Orbetello. 

La fête à Massa Maritima 

En direction du nord de la Toscane et de Pise, Massa Marittima est aussi une jolie ville médiévale située dans les collines de la Maremme. Perchée à 380 mètres au-dessus du niveau de la mer, elle est connue pour sa magnifique cathédrale romane, sa place principale pittoresque et ses ruelles étroites pleines de charme. Une grande fête s’y est déroulée lorsque j’ai eu le plaisir de visiter cette petite ville. Filles et garçons y lancent le drapeau. Regardez ! 

Je vous ai mis une deuxième photo similaire pour que vous puissiez admirer l’art architectural de cette fabuleuse époque. L’histoire de Massa Marittima est profondément liée aux mines d’argent, de cuivre, de pyrite des collines métallifères, exploitées depuis le premier âge des métaux et ensuite surtout à l’époque étrusque et médiévale. 

Et la musique alors ?  

Alain Barbier, notre éditeur, vous en parlera prochainement. Giacomo Puccini était toscan !  

Regardez et surtout écoutez O mio babbino caro, interprétée par la magnifique soprano Renée Flemming :  

Dans ce contexte découvrez ou relisez notre reportage sur la spinto soprano Olga Barben

Olga Barben se reproduira à nouveau bientôt en Suisse.  

Benvenute 

La Toscane possède une longue tradition dédiée spécifiquement aux femmes due à l’histoire. Ce n’est donc pas étonnant que cette région mondialement connue publie un manifeste des valeurs et lance le projet ‘Benvenute’. Ainsi, les femmes trouvent des offres et des informations spéciales du tourisme de cette région.  

Le sujet de la Toscane n’est encore longtemps pas épuisé. Roger Juillerat continuera à vous raconter son périple et notre éditeur vous dévoilera non seulement des trésors cachés à couper le souffle, des perles gastronomiques, artistiques, féminines et, bien sûr, musicales.   

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