La beauté comme illusion

L’article intitulé La beauté féminine que le comte de Grandvaux nous a promis devait prolonger les réflexions captivantes du professeur André Mermoud. Mais voilà : le comte est parti au bout du monde. Il nous enverra son texte bientôt, promis ! En attendant, notre pigiste Stéfanie Rossier prend le relais avec brio. Rebelle assumée, elle ne cherche pas à plaire — elle cherche plutôt à déranger ! Pour elle, la beauté est une illusion bien huilée.
« Et si tout ce qu’on appelle “beau” n’était qu’un décor bien monté ? », interroge-t-elle. Une mise en scène savamment orchestrée pour nous faire croire à une perfection qui n’existe pas. Son texte démonte les projecteurs, soulève les rideaux, et révèle ce qu’on préfère ignorer : la beauté n’est pas une vérité, c’est une fiction. Une illusion collective, entretenue par les images, les normes, les filtres. Ici, pas de complaisance. Juste une question essentielle : à quoi sert la beauté si elle nous éloigne du réel ? Et si, au fond, le laid avait plus de vérité que le beau ? Plongez dans ce texte décoiffant. Et dites-nous ce que vous voyez, une fois le masque tombé.
La Rédaction

J’ai grandi dans un monde où la beauté semblait avoir des règles gravées dans le marbre : des visages lisses dans les magazines

des chefs-d’œuvre accrochés dans les musées, des paysages figés sur des cartes postales. Comme si la beauté était une vérité universelle, mesurable, indiscutable. Mais si ce n’était qu’un mirage ? Et si la vraie beauté se nichait ailleurs — dans les aspérités, les failles, les détails que l’on ne regarde jamais ? Je vous propose de quitter les sentiers battus pour réapprendre à voir : non pas ce qui est parfait, mais ce qui est vivant. Non pas l’exceptionnel, mais l’ordinaire. Car peut-être que la beauté, la vraie, ne se trouve pas dans ce qu’on nous a appris à admirer, mais dans ce qu’on a oublié de regarder. D’ailleurs, la beauté n’est pas une question, c’est plutôt une rencontre. Mais qu’est-ce que la beauté après tout ? La question sonne comme le début d’un cours de philo barbant. En réalité, c’est un piège. Parce que la beauté n’est pas une question à laquelle on doit répondre, c’est une rencontre qu’on doit vivre. C’est l’étincelle que tu ressens quand quelque chose te touche, te saisit, sans que tu aies besoin de l’expliquer.

La beauté, c’est le côté imprévu de la vie

C’est le vieux monsieur qui danse seul sur une place, la façon dont la lumière du matin joue sur la poussière dans une pièce, la texture d’un mur usé par le temps, le sourire d’un inconnu qui vous fait sentir vivant. C’est le bruit de la pluie sur la vitre quand on est bien au chaud chez soi. C’est la trace de doigt sur une vitre, qui raconte une histoire sans mots.

L’idée de la beauté parfaite est un poids énorme. Elle nous pousse à courir après quelque chose d’inaccessible, à nous comparer, à nous sentir insuffisants. Le plus ironique, c’est que ce qu’on considère comme « parfait » est souvent froid, sans vie. Une mer parfaitement lisse ne raconte rien. C’est quand il y a des rides à sa surface, que le vent s’y reflète de manière désordonnée, que la vie s’y révèle.

La vraie beauté a des aspérités. Elle a des cicatrices, des défauts, des histoires. Un visage marqué par le rire et les larmes est infiniment plus beau qu’un visage figé. Une chanson avec une voix qui déraille légèrement a souvent plus d’âme qu’une voix parfaitement calibrée.

La beauté n’est pas ce qui est uniforme, mais ce qui est unique. Ce qui fait la beauté d’une personne, ce n’est pas sa symétrie, mais la lumière qui brille dans ses yeux quand elle parle de ce qui la passionne. La beauté d’un lieu, ce n’est pas la ligne droite de son architecture, mais l’histoire que ses pierres racontent, la vie qui s’y déroule.

La beauté est une affaire de connexion

Le mot « beauté » vient peut-être du mot latin bellus, qui signifiait « joli » ou « charmant ». Mais si on oubliait l’étymologie pour se concentrer sur l’effet ? La beauté, c’est ce qui nous connecte. C’est une passerelle entre nous et le monde.

Quand tu regardes un coucher de soleil et que ton souffle se coupe, ce n’est pas seulement parce que les couleurs sont belles. C’est parce que tu te sens connecté à quelque chose de plus grand que toi. C’est une rencontre avec l’univers, une prise de conscience de ta place dans ce grand tout.

La beauté est une affaire de sensations. C’est la chaleur d’une main dans la tienne, la vibration d’une basse dans la poitrine, l’odeur de l’herbe coupée après une averse. Ce sont des choses qui ne s’expliquent pas, mais qui s’ancrent profondément en nous. Elles nous rappellent que nous sommes vivants, que nous avons un corps capable de ressentir, d’être ému.

Ne cherche pas la beauté, reconnais-la

Arrêtons de chercher la beauté comme un trésor caché. Arrêtons de la classer dans des cases « art », « nature », « personnes ». La beauté est partout, tout le temps. Il suffit d’être là, d’être présent, d’ouvrir ses sens.

La beauté, c’est un choix de perspective. C’est décider de voir le verre à moitié plein. De voir la poésie dans un quotidien parfois gris. C’est un muscle qui se travaille : plus tu cherches la beauté, plus tu en trouves. Et plus tu en trouves, plus ta vie s’illumine. Alors, la prochaine fois qu’on te demandera « qu’est-ce que la beauté ? », ne te sens pas obligé de donner une définition. Souris, et pense à la dernière fois que tu as senti cette étincelle. À cette chose simple, imparfaite, qui t’a fait dire, sans réfléchir : « Ah, c’est beau. » Et c’est tout ce qui compte !

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