Intervention de chirurgie dentaire difficile chez un patient âgé. Savoir-faire et longue pratique sont indispensables!
Dans mon précédent article consacré à l’évolution des soins dentaires et notamment aux inlays et onlays, je vous disais que les facteurs de succès des soins dentaires dépendent essentiellement :
- du patient, (habitude, génétique, etc.)
- du praticien,
- du matériau choisi,
- des indications et contre-indications des onlays.
Comme je vous ai d’abord parlé de vous, patient, je vais m’étendre maintenant aux trois autres éléments du succès.
L’immense responsabilité du praticien
Mieux votre dentiste aura été formé et surtout plus il aura pratiqué, mieux il saura évaluer la situation. Il saura aussi apprécier à sa juste valeur les structures résiduelles et la vitalité pulpaire (le nerf de la dent pour les profanes). De plus, un médecin responsable étudie constamment l’évolution scientifique en la matière, de manière à proposer toujours la meilleure option possible à sa patientèle.
Dans sa précieuse thèse soutenue en 2019a, le docteur Alexis Goujat concluait: « L’ensemble de cette démarche permet au clinicien d’avoir au final des gestes cliniques s’appuyant sur des publications scientifiques en attendant des recommandations à haut niveau de preuve, telles des études de cohortes ou des méta-analyses ». Bref, la faculté de votre dentiste à prendre des décisions est cruciale. Remarquez que lorsque vous confiez le soin de vos précieuses dents à un Centre dentaire où plusieurs dentistes pratiquent, les deuxièmes avis peuvent intervenir à l’interne. C’est une mesure de sécurité supplémentaire lorsque la décision à prendre [par exemple, pour l’indication ou, au contraire, la contre-indication d’un acte de chirurgie dentaire], est particulièrement importante suivant le cas. Il en va de même de toute la préparation de la cavité. Il importe que le dentiste procède à une réévaluation peropératoire en fonction du protocole instauré, le matériau choisi et, bien sûr du suivi clinique. Le praticien doit savoir faire le bon choix. Il doit être déterminé et avoir de l’esprit de suite dans les idées pour le traitement qu’il propose et ce en fonction des facteurs influençant la durabilité et l’économie du traitement.
Que signifie peropératoire?
Tout simplement ce qui se produit, peut se produire ou doit se faire pendant une opération chirurgicale.
Même si l’intervention chirurgicale dentaire ne saurait être comparée aux autres actes chirurgicaux, ailleurs que dans la bouche, les modifications physiologiques liées, par exemple, au vieillissement, jouent un rôle essentiel dans la tolérance des patients âgés aux interventions chirurgicales1. Un médecin-dentiste doit donc évaluer le traitement dentaire à sa juste valeur.
Il en va de même de l’anesthésie. L’utilisation des anesthésiques locaux fait partie de la routine du dentiste. Les anesthésiques lui permettent de réaliser de nombreuses interventions médico-dentaires aussi indolores qu’efficientes. Certes, les effets secondaires sont assez rares, mais ils peuvent toutefois aussi être graves. C’est dire que des complications peuvent survenir. Il s’agira par exemple de complications cardiovasculaires, de réactions allergiques, voire carrément d’intoxications ou même de lésions nerveuses. J’y reviendrai dans un prochain article. Voilà qui explique pourquoi le choix de son médecin-dentiste est si important, car anesthésiant avec une extrême responsabilité et en prenant absolument toutes les mesures préventives, il vous évitera largement toutes ces potentielles complications2. Une complication peropératoire contraindra le médecin-dentiste à modifier son plan de traitement. En effet, parfois, le dentiste ouvre une dent et constate des dégâts carieux bien plus importants que ce qu’il a pu diagnostiquer par examen radiographique. Il devra finir par extraire la dent. Je vous propose un autre exemple encore: en cours de chirurgie, nous devons ouvrir la gencive et nous découvrons qu’il manque énormément d’os. Conséquences? Il convient de pratiquer une greffe.
Les décisions du dentiste
D’abord, comme je viens de le dire, le dentiste tiendra compte de nombreux paramètres, de possibles facteurs allergiques, ainsi que de la situation et de la nature des limites cervicales, autrement dit, il appréciera dans ce cas ce qu’il reste de matière dentaire3. Il déterminera un type précis de restauration, le matériau d’assemblage et ses propriétés biologiques, physico-chimiques, ainsi que cario-protectrices. Il appréciera le matériau en fonction de la restauration et de l’occlusion dentaire4 sans oublier les parafonctions5. Le dentiste évaluera les avantages et les inconvénients spécifiques selon les propriétés intrinsèques du matériau de reconstitution envisagé. En effet, chaque matériau a ses avantages et ses inconvénients. Aussi le praticien devra-t-il porter son choix au matériau le plus adapté possible en fonction de l’examen clinique du patient.
Les matériaux
- Résine composite
Ce type de résine existe mais la dentisterie ne l’utilise plus guère.
- Céramiques feldspathiques stratifiées
J’en parlerai une autre fois, car pour les inlays-onlays, elles n’ont guère d’utilité.
- Céramique pressée (fonctionne très bien dans la pratique)
Au fond, pour les inlays-onlays, on n’utilise que la technique exposée aux lettres c. et d. Et je n’ai mentionné celles des lettres a et b que pour souci d’être exact et complet. Là, on commence à avoir des matériaux ayant une performance clinique allant jusqu’à 12 ans.
- Technique CFAO6, (fonctionne également bien)
En matière d’inlay ou d’onlay, la longévité de ce matériau est supérieure à 10 ans, ce qui est, somme toute, aussi très satisfaisant.
Avec la CFAO on peut usiner des pièces en résine composite, céramique, zircone, etc.
Indications et contre-indications
Comme notre objectif est toujours de favoriser au maximum la préservation à la fois dentaire et pulpaire, les performances cliniques des inlays-onlays céramiques diffèrent à l’évidence selon les matériaux utilisés ou procédés de mise en forme. Il y a autant d’indications (par exemple, dents cassées, dents avec immense restauration à refaire, dents avec paroi manquante, etc.). Je ne puis donc pas ici vous en dire plus. Mais tout dentiste saura vous en dire davantage.
1American Geriatrics Society 2012 Beers criteria update expert panel. American Geriatrics Society Updated Beers criteria for potentially inappropriate medication use in older adults. J Am Geriatr Soc 2012;60: 616-31.
2Cummings D R et al.: Complications of local anesthesia used in oral and maxillofacial surgery. Oral Maxillofac Surg Clin North Am. 2011; 23 (3): 369–377
3Thèse pour le diplôme d’état de docteur en chirurgie dentaire par Aude Vallata, Les limites cervicales en prothèse fixée : concepts et préceptes présentée et soutenue en 2011 (cf. https://hal.univ-lorraine.fr/hal-01732671/document )
4On parle d’occlusion dentaire quand la bouche est au repos. On entend ainsi par-là, le positionnement et l’alignement des dents de la mâchoire supérieure avec celles de la mâchoire inférieure.
5http://univ.ency-education.com/uploads/1/3/1/0/13102001/dent3an25-paro-parafonctions.pdf
6CFAO : Conception et fabrication assistées par ordinateur
aThèse de doctorat de l’Université de Lyon soutenue en 2019 par Alexis Goujat : Inlays/onlays usinés par CFAO : critères d’évaluation in vitro des assemblages collés, complémentarité des études expérimentales, cf. https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-02343177/document